Quelques notables d’Europe Ecologie – Les Verts ont participé à la manifestation du 17 Novembre contre le projet l’aéroport de Notre Dame des Landes. La direction du Parti n’hésite plus à affirmer son désaccord avec le Gouvernement de Hollande sur ce non-sens écologique. EE/LV Ile de France a mobilisé ses adhérents et sympathisants, affrété des cars pour transporter les manifestants. Et pourtant, EE/LV peine à convaincre de sa détermination. Pour cause…


Pas question de démissionner juste pour une question d’aéroport…

Cette méfiance des opposants à l’aéroport n’est guère surprenante lorsque l’on écoute Jean-Philippe Magnen, porte-parole d’EE/LV et Vice-Président du Conseil régional des Pays de la Loire qui certes se désole de l’attitude du Gouvernement mais affirme en même temps que « On ne va pas mettre en jeu la participation gouvernementale uniquement sur la question d’un aéroport ». Des propos qui n’étonneront pas d’un Vice-Président d’un exécutif régional qui est en faveur de l’aéroport avec un président PS, Jacques Auxiette qui s’en est fait le farouche propagandiste. Un thuriféraire qui n’hésite ni à mentir en affirmant que « Tous les recours (en justice) sont épuisés » ni à dénigrer les opposants au projet, les traitant « activistes professionnels » qui seraient mis en scène « par des gens qui ne connaissent pas ou partiellement le projet ». Les paysans expropriés, grévistes de la faim apprécieront.
Jean-Philippe Magnen comprend très bien l’attitude des ministres EE/LV, Canfin et Duflot agrippés à leur marocain, il ne songe pas non plus à démissionner de son poste. Par contre, il n’a pas saisi ou ne veut pas saisir l’enjeu de cette lutte.

Le vice-président EE/LV du Conseil régional des Pays de Loire n’a pas saisi l’enjeu du combat

Qu’il relise donc l’article Hervé Kempf paru dans le Monde du 22 Octobre dernier. Hervé Kempf l’affirme avec force : sur ce projet se cristallisent toutes les problématiques constitutives de la crise écologique de ce début du début de ce siècle. Il écrit : « La résistance tenace, non violente, assise sur des expertises solides, de paysans, d’élus, d’écologistes, de citadins, d’habitants anciens et nouveaux, a retardé le projet. Elle a permis de voir que se cristallisent ici toutes les problématiques qui forment le complexe écologique de ce début du XXIe siècle. Ce n’est pas Trifouilly-les-Oies, c’est une cause nationale. » Hervé Kempf poursuit en expliquant qu’un des enjeux de ce combat contre ce projet d’aéroport est la préservation des zones humides essentielles à la biodiversité : « Alors que (…)les zones humides, essentielles à la biodiversité et à la régulation des écosystèmes, ont perdu dans le monde la moitié de leur superficie depuis un siècle, on s’apprête en France à détruire un site dont 98 % des terres sont des zones humides. » C’est ensuite une tentative de stimuler le trafic aérien alors qu’il faudrait le réduire car il est un « important émetteur de gaz à effet de serre » Même si, contrairement à Kempf, on doute de l’importance du C02 comme cause de ce réchauffement, il reste que l’épuisement des énergies fossiles est inéluctable et le transport aérien un gaspillage éhonté qui sera bientôt une folie hors de prix. C’est aussi une artificialisation des sols accompagnée de la disparition de paysans, l’une et l’autre que l’on fait mine de déplorer dans les sphères gouvernantes mais qui sont planifiées à Notre Dame des Landes « ce qui les justifiera ailleurs » Enfin, « alors que le pouvoir du capital et les partenariats public-privés sont partout dénoncées, on donne les clés du projet à la multinationale Vinci. » Voilà les quatre raisons majeures énoncés et développées par Hervé Kempf qui font que ce qui se passe à Notre Dame des Landes, cette sorte de guérilla rurale où l’État PS se montre plus féroce et brutal que l’Etat sarkozysiste est crucial pour l’écologie.

Des notables EE/LV peu crédibles

Au regard de ces enjeux comme de la répression policière menée par le gouvernement PS à participation EE/LV, la prose de Jacques Archimbaud, secrétaire National adjoint d’EELV est pitoyable : « Il y a certes des choses qui plaisent plus ou moins bien (sic !) aux écolos dans la politique suivie par les socialistes sur un certain nombre de sujets » « Il faut (....) réaffirmer avec une certaine force que l’appartenance (des ministres EE/LV) au gouvernement de ce pays est durable parce qu’ils ont le sentiment de lui être utile. » Utile pour quoi faire ? Ils n’ont pu réussir à le dissuader d’entreprendre aucune de ses nombreuses actions « écolocides » si j’ose dire et dont la répression organisée à Notre Dame des Landes est l’expression la plus achevée.
Jacques Archimbaud joue le bon chien qui n’est que la voix de sa maîtresse, l’arriviste Cécile Duflot aujourd’hui ci-devant ministre. Le 17 novembre 2012, elle a assuré qu’elle avait la «certitude d'être à (sa) place» au gouvernement » au moment même où de nombreux écologistes affrontaient l’actuel gouvernement en manifestant contre l'évacuation des opposants à l'aéroport. C’est la même Cécile DUFLOT qui à l’université d'été des Verts en août 2010, lorsqu’elle était encore secrétaire nationale d’Europe-Ecologie / Les Verts s’écriait : « Je le dis les yeux dans les yeux, l'accord de 2012 avec le PS, s'ils ne lâchent pas sur Notre Dame des Landes, ce sera non. »

L’écologie dépourvue d’expression politique

La réaction de Stéphane Lhomme à la présence des dirigeants d'EE/LV sur le site de Notre Dame des Landes est significative. Il écrit : « Les notables d'EELV sont sortis de leurs bureaux dorés pour tenter de faire oublier qu'ils cautionnent toutes les horreurs anti-écologiques et antisociales du PS. Deux ministres EELV, la confiance votée à Ayrault par les deux groupes EELV (assemblée et sénat), des tas de conseillers régionaux accordés par le PS, des élections municipales à venir où EELV mendie encore et toujours des places au PS... La vérité est que le chantier du réacteur EPR, le chantier de l'aéroport NDDL, le pseudo "débat sur l'énergie" etc., tout cela est cautionné par les notables EELV. Pas étonnant que la permanence nantaise du député "écologiste" (option arriviste PS) de Rugy ait été taguée(…) Si la base EELV ne recadre pas ses "élites" (elle pourrait d'ailleurs les révoquer), elle n'aura bientôt plus que ses yeux pour pleurer... »
Stéphane Lhomme se trompe sur un point et pèche par optimisme. La « base » d’EE/LV se réduit comme peau de chagrin. Elle ne pourra pas recadrer ses « élites ». Le Parti est verrouillé par les élus et collaborateurs patentés d’élus qui ont le temps et l’argent. C’est trop tard. Les notables Verts sont entre eux pour le plus grand malheur de l’écologie qui n’a plus d’expression politique digne de ce nom.



Lundi 26 Novembre 2012 Commentaires (0)

Les vrais écolos dès qu'ils le peuvent manifestent contre le projet d'aéroport de Notre dame des Landes, sur place ou ailleurs, devant l'assemblée nationale, par exemple. Mais les ministres EE/LV se taisent et sont complices. Le grand écart?


Notre dame des Landes : Manifestez si vous le pouvez .....

Samedi 24 Novembre 2012 Commentaires (2)
Il s'agit d'envoyer une lettre à François Hollande pour lui faire connaître votre opposition à l'aéroport. En voici le texte :

Monsieur le Président de la République

Que voulez-vous que les générations futures retiennent de votre premier mandat ?
Que vous aurez imposé un projet anachronique sur le plan de la lutte contre l'effet de serre ou de la démocratie participative, pharaonique sur le plan des dépenses publiques en crise, anti écologique sur le plan de la biodiversité et de la préservation des zones humides, aberrant sur le plan technique et économique ?
Ou au contraire que vous aurez suivi la voie de la sagesse et du bon sens en rendant les terres de Notre Dame aux Landes ?

En ce qui nous concerne nous avons choisi de faire de ce dossier au besoin le Larzac ou le Plogoff de vos prédécesseurs.

En vous en remerciant par avance, nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, en l’assurance de notre très haute considération


Pour les modalités de l'envoi et pour avoir une revue de presse sur le thème , cliquer ici

Lundi 12 Novembre 2012 Commentaires (0)

Pour le Grand Paris Express comme pour tous les projets soumis à étude d’impact, une « autorité environnementale » (Ae) doit donner son avis et le mettre à disposition du maître d’ouvrage et du public. Il ne s'agit pas pour cette Ae de se prononcer sur l'intérêt ou l’opportunité du projet mais de juger de la qualité de l'étude d'impact et de la prise en compte de l’environnement dans le projet.
L'Ae considère que le dossier présenté par la Société du Grand Paris concernant le tronçon Pont de Sèvre / Noisy – Champs ne permet pas de juger de l'impact de ce tronçon, dit T0, sur l'environnement alors que la prise en compte de cet environnement risque d'influer sur l'économie du projet dans des proportions que l'on ne peut estimer faute d'études suffisantes. L'Ae recommande donc que ces études soient complétées et affinées pour que soit présentée lors de l'enquête publique une étude d'impact qui permette au public de se forger un jugement en connaissance de cause. Vu l'ampleur des manques à combler, cette enquête publique risque fort d'être retardée.


Un dossier illisible
Tout d'abord, l'Ae regrette que le volumineux dossier présenté comme étude d'impact soit d'une lecture mal aisée. Elle demande de joindre « un sommaire général exhaustif clair », « d'user moins souvent du renvoi aux atlas cartographiques pour la présentation des cartes nécessaires à la compréhension directe des textes » Enfin elle demande que soit distingué entre ce qui relève de l'étude d'impact du tronçon proprement dit de ce qui concerne l'impact global du Grand Paris.
En d'autres termes, moins diplomatiques, tout était fait pour rendre impossible toute lecture critique du dossier par le public.
Lorsque la Société du Grand Paris ne peut pas remplacer l'information par des grand-messes de communicants dans des réunions dites de concertations, elle rend cette information indigeste et si touffue qu'elle en devient inaccessible. Avec l'argent qui est extorquée aux Franciliens sous la forme d'une nouvelle taxe qui alourdit leurs impôts locaux ( la TLE), la Société du Grand Paris peut se payer des experts dans l'art de prendre les gens pour des c... et des vessies pour des lanternes. C'était sans compter sur l'article R. 122-6 du code de l’environnement qui institue cette Ae composée membres qui ont pris leur tache au sérieux.

Une étude bâclée
Outre ce défaut de forme, l'AE pointe de graves insuffisances dans les études sur l’insertion du projet dans son environnement tant pendant le chantier que lors de l’exploitation future de la ligne.

Elle constate que « les études préalables sont très inégalement avancées selon les thèmes. Ainsi les études géotechniques, les études hydrauliques et hydrogéologiques et, pour la phase chantier, les études relatives aux vibrations et au dispositif d’enlèvement et de traitement des déblais apparaissent insuffisantes. » Elle ajoute que « La mention, fréquemment reprise dans le dossier, d’études plus précises ultérieures ne peut exonérer le maître d’ouvrage de fournir, au public comme aux autorités chargées d’apprécier l’utilité publique du projet, les éléments d’appréciation nécessaires dès l’étude d’impact » En d'autre termes, il ne saurait être question de croire sur parole la SGP et de partager son optimisme béat, mainte fois manifesté par ailleurs. Conséquence de ces manques : un dossier qui ne permet d’apprécier ni les modalités ni les coûts des mesures à envisager et par là est insuffisant « pour donner à l’enquête publique tout son sens, au regard des impacts du projet » Il devra donc être complété.

Une étude non conforme à la réglementation
Et il ne s'agit pas simplement d'ajouter quelques points de détails : « si les différentes catégories d’enjeux ont bien été identifiées par le maître d’ouvrage, la plupart des études nécessaires à leur bonne prise en compte n’ont pas été réalisées. Pour la quasi-totalité des enjeux identifiés, le dossier indique que des études « devront être réalisées » sans apporter de détail supplémentaire. L’Ae rappelle que l’étude d’impact doit comporter tous les éléments permettant d’apprécier et de prendre en compte les enjeux environnementaux réels spécifiques au projet considéré, à son tracé, et en particulier à son implantation en souterrain. Elle recommande au maître d’ouvrage de mettre le dossier en conformité avec cette prescription » Il semblerait qu'il y a de telles lacunes à combler que l'enquête publique pourrait bien être retardée.

Un manque de précision quant à l'impact du GPE sur l'urbanisme
L'urbanisme est un sujet sensible en Petite couronne. Pour juger des effets du projet, il est nécessaire d'avoir des analyses précises et claires. Or, le dossier est confus. On ne peut donc que suivre l'Ae lorsqu'elle recommande « de distinguer dans la présentation du dossier, au titre de ce qui est présenté comme le « développement territorial », les effets potentiels sur l’urbanisme de la réalisation du projet de tronçon T0, et du programme complet, de ceux qui dépendent d’autres facteurs non liés au projet T0 ou au programme GPE. » On ne peut que souscrire à cette exigence qui permettrait de lever le masque du GPE et de révéler sa véritable nature. Voir ici

Une « rentabilité socio-économique » incertaine 
L'Ae considère que « les calculs de rentabilité socioéconomique du projet T0 et du programme GPE, hors prise en compte de leurs impacts sur la biodiversité (et sur d’autres externalités, notamment sociales), font apparaître une rentabilité assez bonne pour le programme d’ensemble, nettement moins bonne, voire négative dans certaines hypothèses, pour le projet T0 seul » mais que « la prise en compte des impacts environnementaux locaux du projet T0, après réalisation des études nécessaires mentionnées plus haut, viendra probablement peser négativement sur cette évaluation de la rentabilité du projet, par l’effet des compléments d’investissements éventuellement nécessaires » Tout dépendra donc in fine du bilan environnemental qu'il n'est pas possible de cerner compte tenu des manques dans les études actuellement disponibles et des incertitudes concernant les politiques d'aménagement qui seront mise en œuvre.

Après le milliard manquant, l'utilisation de la Taxe locale d'équipement à d'autres fins que celles du financement du GP, voici un nouveau coup porté au GPE et au Grand Paris. Bien que l'Ae ne juge pas sur l'opportunité du projet, les défauts qu'elle soulève concernant l'étude d'impact sont autant de motif de tout remettre à plat. C'est encore plus criant lorsque l'on lit son analyse dans le détail(voir notamment les passages concernant les gares et leur impact) Plus que jamais un retour à un projet à la fois plus modeste et plus adapté s'impose. Il faut faire renaître le projet Arc express dans son originalité et le mettre en concurrence avec le Grand Paris Express. Cela pouvait sembler irréalisable hier mais devient possible aujourd'hui. Plus que jamais nous devons dire Stop au Grand Paris express et demander la dissolution de la Société du Grand Paris. La poursuite d'un projet réaliste et adapté doit se faire dans le cadre du Stif.

Samedi 27 Octobre 2012 Commentaires (0)

SAMEDI 20 OCTOBRE 2012 à 12h À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Appel de l’ACIPA (Association Citoyenne Intercommunale des Populations concernées par le projet d'Aéroport de Notre Dame des Landes), des militants-tes libertaires, EELV, citoyens vigilants, …


En 2010, déjà et aujourd'hui de nouveau à Notre-Dame-des-Landes
En 2010, déjà et aujourd'hui de nouveau à Notre-Dame-des-Landes
Suite à l'expulsion indigne et brutale en cours à Notre-Dame-des-Landes, nous appelons à manifester notre soutien aux expulséEs de la Zone à défendre et à continuer de résister au projet d'aéroport, samedi 20 octobre 2012 à 12 h, à un pique-nique festif et militant place Édouard-Herriot, Paris 7ème, métro Assemblée nationale.

Les moyens disproportionnés employés pour déloger les habitant(e)s et leurs soutiens ne masquent plus les intentions du gouvernement et de Vinci. Il s'agit (...) d'imposer un Grand Projet inutile, véritable gouffre financier.
Pour rappel, il vise
  • à raser 2 000 hectares de bocage, démembrer 40 000 hectares aux environs de Nantes et Rennes et donc y détruire la biodiversité,
  • à construire un aéroport sur un terrain argileux et très fertile avec les affaissements qui en découleront alors qu'un aéroport volontairement sous-exploité existe déjà,
  • à construire un barreau routier titanesque avec tout autour d'énormes zones commerciales et industrielles.

UNE CATASTROPHE ÉCOLOGIQUE ET SOCIALE EST EN COURS. MOBILISONS-NOUS.

Nous appelons à un pique-nique de solidarité avec les habitant(e)s de Notre-Dame-des-Landes, samedi 20 octobre 2012 à 12 h, place Édouard-Herriot, Paris 7ème, métro Assemblée nationale

Cliquer sur la photo pour visiter le site de l'ACIPA

Jeudi 18 Octobre 2012 Commentaires (0)

Le Grand Paris avance masqué. Ne tombons pas dans le panneau!


Derrière les projets apparents d'amélioration de certains transports franciliens, se mettent en place plus discrètement des délocalisations d’emploi sur des pôles de concentration éloignés de l’habitat, ainsi qu’une consommation de terres agricoles précieuses à conserver.
Ces délocalisations d’emploi feront perdre tout le bénéfice des améliorations des transports.
Cela aggravera encore le déséquilibre entre l’Ile de France et les autres régions au détriment de l’emploi local. Cela se traduira par un nouvel afflux d'habitants qui rendra encore plus aigu le problème du logement.
C’est pourquoi la Coordination pour la Solidarité des Territoires en Ile de France (COSTIF) se mobilise contre cet aspect caché du projet de Grand Paris, et demande un MORATOIRE IMMEDIAT sur le projet de Grand Paris dont la logique de fond est profondément inégalitaire et destructrice.
Notre protestation n’est pas que Francilienne. Toutes les régions françaises sont aussi concernées par les conséquences néfastes de ce projet qui renforce l'hyper-concentration des richesses en Ile de France.

La Coordination pour la Solidarité des Territoires en Ile de France met en ligne une pétition. En voici la présentation et le texte.

Stoppons le projet de Grand Paris de la démesure, de la finance, de la spéculation immobilière, d’opérations dévoreuses d’espaces agricoles, de la dégradation de l’environnement, de l’aggravation des inégalités…

Des habitants de l’Ile de France, des membres de collectifs et d’associations soutenus par la Coordination pour la Solidarité d’Ile de France et contre le Grand Paris (COSTIF) vous appellent à une signature de cette pétition pour un moratoire du projet Grand Paris :

Le Grand Paris avance masqué en faisant miroiter aux élus locaux des investissements publics, aux habitants des créations d’emplois et de nouveaux transports.

Au contraire, le projet du Grand Paris va concrètement :
- concentrer l’emploi sur quelques pôles (450 000 m² de bureaux supplémentaires à la Défense, campus de Saclay, pôle d’affaires du Grand Roissy…)
- faire disparaître des emplois de proximité en les déplaçant ou en les concurrençant,
- accroître la relégation des populations modestes dans des zones de moins en moins favorisées,
- détruire des terres agricoles très fertiles (plateau de Saclay, triangle de Gonesse, Plaine Monjtean, site du projet « Village nature », Plaine de la Goële et du Multien, plaine d’Achères…),
- détériorer durablement les conditions de la recherche en imposant l’opération campus Paris-Saclay,
- favoriser encore plus la spéculation foncière,
- renforcer toujours l’hypertrophie de l’Ile de France préjudiciable aux autres régions, qui se voient vidées de leurs populations actives, les plus jeunes et les plus qualifiées. Cette hypertrophie dégrade chaque jour les conditions de transport de centaines de milliers de Franciliens, sur la route, comme dans le RER !
- augmenter les nuisances environnementales comme le trop plein de déchets (stockage, incinération) et les pollutions néfastes pour la santé (air, eau...).

Dire Stop à ce Grand Paris, ce n’est pas refuser l’amélioration indispensable des transports au niveau régional, c’est dire non à un Grand Projet Inutile, Imposé, démesuré et coûteux ne répondant pas aux besoins des habitants, destructeur du tissu économique et des terres agricoles fertiles du pourtour parisien.
Dire Stop à ce Grand Paris, c’est refuser les prérogatives abusives de l'État au détriment des pouvoirs des communes, intercommunalités et de la région.

Dire Stop à ce Grand Paris, c’est demander pour tout projet d'opération d’aménagement du territoire un véritable débat sur l’opportunité et un réel accès aux informations, en apportant des moyens aux associations et aux collectifs pour faciliter l’élaboration de leur contre expertise.

Dire Stop à ce Grand Paris, c’est demander dès à présent l’arrêt des projets suivants : Europa City à Gonesse - extension de l’aéroport de Roissy - campus Paris-Saclay – Village Nature - développement de la Défense, ainsi que la suppression des projets de métro et gares dans les zones agricoles et la fin du gaspillage provoqué par les créations d’établissements publics (Société du Grand Paris, Etablissement public Paris-Saclay).

Nous soussigné/es, demandons au Premier Ministre un moratoire immédiat sur le Grand Paris,
afin que s’engage une réelle concertation pour :
1) relocaliser des emplois dans les lieux de vie des habitants, réduisant la demande de transports.
2) améliorer en priorité et en urgence les réseaux existants et créer des transports de proximité à partir d’une véritable analyse des besoins.
3) nourrir davantage les Franciliens avec les produits des terres agricoles préservées.
4) permettre une véritable égalité et solidarité entre tous les territoires d’Ile de France.

Pour signer cette pétition, cliquer ici

Lundi 15 Octobre 2012 Commentaires (0)
Le gouvernement n’a pas retenu les financements nécessaires à la réalisation du Grand Paris lors de ses arbitrages budgétaires. Est-ce à dire que l’on se contentera d’un Petit Paris ? Ce n’est pas sûr. Le tandem Hollande-Ayrault n’est pas un adepte du « small is beautiful » Quant à Duflot, sa boussole écologique s’étant définitivement détraquée, la voici en train d’essayer de passer outre cet heureux arbitrage. Au Conseil régional d’Ile de France, ce n’est guère mieux. Les vice-présidents et vice-présidentes EE/LV se prennent pour des VIP et prennent les militants et les électeurs écolos pour des poires. Pour faire passer la pilule du Grand Paris et du nouveau Sdrif, masquer leurs petits arrangements capitulards auprès des adhérents, rien ne vaut l’opacité et les dénis de démocratie qui vont avec.

Les écologistes devraient se réjouir : ils étaient tous contre le Grand Paris, ce projet pharaonique qui allait :
  • entrainer l'urbanisation du plateau de Saclay et noyer sous le béton des terres parmi les plus fertiles sur lesquelles une agriculture de proximité aurait pu se développer et concourir à une meilleure autonomie alimentaire de la région capitale,
  • permettre la réalisation de projets comme l’Auchan de Gonesse et autres joyeusetés consuméristes,
  • pomper tous les crédits nécessaires à l’amélioration des lignes de transport en commun existantes saturées, déglinguées, indignes comme le RER B aux horaires devenus incertains, aux rames de récup bourrées d’amiante et sans climatisation,
  • accentuer la concentration francilienne au mépris d’un aménagement harmonieux de l’ensemble du territoire hexagonal,
etc. …
Finalement les restrictions budgétaires ont du bon, si elles permettent de tordre le cou à des projets délirants, néfastes de cet acabit qui vont dilapider d’énormes quantités de richesses et ressources naturelles pour le plus grand et au seul profit des entreprises du BTP. De plus que ce soit Jean Marc Ayrault qui préside à ces renvois de projets aux calendes grecques est assez drôle, lui qui fut un grand initiateur de travaux totalement inutiles, dispendieux et anti-écologiques comme Notre Dame des Landes.

Oui, les écologistes devraient se réjouir et beaucoup le font mais pas Cécile Duflot.

La ministre fraîchement nommée court après le milliard qui permettrait de remettre le Grand Paris express sur ses rails. Voici un extraordinaire retournement de veste complet, plus que jamais confirmé, moins que jamais expliqué, assumé sans pudeur par cette arriviste qui n’a rien d’une écologiste. Il remplit d’aise Jean Paul Huchon qui a déclaré « la ministre Cécile Duflot défend désormais ce dossier sans ambiguïté » alors qu’elle le pourfendait avec une égale détermination, naguère lorsqu’elle était conseillère régionale.
Quand on constate le coût démentiel du Grand Paris express, on se dit rien n’est trop cher et trop beau pour la région capitale, pour y attirer et y agglomérer encore plus de gens : à ce stade, il ne s’agit plus de ville mais d’agglomération, le mot voulant bien dire ce qu’il dit ; une agglomération dévoreuse de terres arables parmi les plus fertiles que l’on veut faire passer pour la capitale de l’Europe alors que celle-ci ne peut exister que multipolaire.
C’est sans doute par antiphrase que le ministère de Madame Duflot s’intitule ministère de « l’égalité des territoires » ! Imaginez tout ce que l’on pourrait faire avec de telles sommes : par exemple des services pour le maintien à domicile des personnes âgées dans les hameaux reculés de nos montagnes et campagnes ou bien le très haut débit pour tous, ou encore construire sans attendre une ligne TGV pour l’Auvergne qui reste enclavée avec des trains qui ont pour terminus Bercy, une gare qui n’est même pas reliée aux TC de la capitale. Mais sans doute Madame Duflot, géographe à la géographie incertaine ne sait pas mieux localiser Clermont-Ferrand ou Aurillac sur une carte de France que le Japon sur un planisphère et peut-être n’y a-t-il comme territoires pour Madame Duflot que ceux qui partagent la région parisienne.
En tout cas les relations sont grosses de conflits potentiels entre le ministère Duflot et l’immense majorité des écologistes qui persistent et signent dans leur opposition au Grand Paris de Sarko-Hollande, qui restent les adeptes d’une déconcentration de l’Ile de France et d’un véritable aménagement du territoire hexagonal. Si la façon dont ont été reçus des représentants d’Europe-Ecologie les Verts des Hauts de Seine est bien telle que l’on me l’a rapportée, ce n’est qu’un début…. La ministre n’a pas daigné les recevoir en personne et à leurs interrogations sur les dossiers de l’ex Epad, du Grand Paris Express qui les concernent directement en tant que militants ou élus de terrain, ils n’ont eu que du vent comme réponse à leurs questions et à leurs interrogations.

Avec la Région Ile de France, cela ne va guère mieux

Schéma régional de cohérence écologique élaboré et voté sans concertation ni avec les groupes locaux, ni avec les élus de terrain qui n’ont même pas eu à disposition les textes ; Sdrif et Grand Paris élaborés par des technocrates dans la plus grande opacité, véritable déni de démocratie avec une consultation des militants bidon et après coup… Tout cela parce qu’il faut faire avaler des couleuvres et masquer les reniements.

On peut augurer que l’hémorragie militante va se poursuivre et la descente aux enfers électoraux s’accélérer. L’exemple du parti belge « Écolo » devrait pourtant servir d’avertissement à la Ministre et aux divers Vice-Président(e)s de la Région Ile de France : être pour une politique parce que l’on est au pouvoir alors qu’en tant qu’écologiste il faudrait être contre leur a coûté la moitié de leurs voix. Avec des scores plafonnant aux alentours de 4% , EE/LV se retrouverait dans une fourchette allant de 1 à 2%, et sans autre issue que de s’accrocher aux basques du PS pour assurer sa survie au prix de la mort de l’écologie comme force politique efficace en France.

Mardi 9 Octobre 2012 Commentaires (0)

Du moins en a décidé ainsi le Conseil constitutionnel qui s’est rallié à l’argumentaire de Jean-Marc Ayrault. Ses services ont présenté, en son nom, au Conseil constitutionnel plusieurs demandes de rejet du recours des associations Comité radicalement anti corrida Europe (CRAC) et Droits des animaux avec un argumentaire que le Conseil constitutionnel semble avoir retenu en grande partie pour justifier sa décision de rejet, décision qui a suscité la consternation et la colère chez les défenseurs des animaux et chez tous ceux qui réprouvent des actes de barbarie et de cruauté gratuite envers des êtres vivants. « Le Conseil constitutionnel n'est pas constitué de Sages mais de lâches ! » s’est indignée Brigitte Bardot.


Il est tout de même étonnant que le gouvernement ait cherché à influencer à ce point la décision du Conseil constitutionnel. Le CRAC s’en était scandalisé. Il en avait appelé au Président de la République, François Hollande qui s’en est lavé les mains en parfait Ponce-Pilate. Il a refusé d’intervenir, prétendant qu’il ne voulait pas porter atteinte à l’indépendance de l’autorité judiciaire ; une indépendance mise à mal par les interventions répétées de son premier ministre et de son ministre de l’intérieur. Jean-Marc Ayrault n’a pas fait dans la dentelle. Il s’est substitué aux deux ministres concernées, deux femmes, Aurélie Filippeti pour la culture et Christiane Taubira pour la justice, l’une et l’autre anti-corrida. Elles n’ont pas eu le droit à la parole tandis que le ministre de l’intérieur, Manuel Valls enfonçait le clou en se prévalant de son origine catalane, en déclarant son amour pour la corrida, en parlant de « racines » qu’il ne fallait pas arracher alors que, Ô ironie, les corridas sont interdites à Barcelone depuis 2010 sans que les Catalans se sentent acculturés dans une mondialisation nivelant les différences.

L’article 521-1 du code pénal en débat

Les associations anti-corrida contestaient la constitutionalité de l’alinéa 7 de l’article 521-1 du Code pénal. Cet article stipule que « le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende. » tandis que son alinéa 7 introduit une exception pour les corridas : « Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée » Cet alinéa instaure une inégalité devant la loi, contraire à la constitution puisqu’à Paris, Nantes, Bordeaux ou Clermont-Ferrand, le matador serait conduit en prison, tandis qu’à Nîmes, Arles, Alès, il est porté en triomphe par des barbares déchaînés et que , même à Nîmes, Arles, Alès, si les tortures infligées au taureau ne le sont pas par un matador dans une arène, c’est une grosse amande et/ou la prison. Or, la constitution stipule que nous sommes tous égaux devant la loi. Donc l’alinéa 7 est anticonstitutionnel, contraire à l’article 6 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 : « La loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » Il doit donc être aboli. Cela paraît limpide. Mais en droit, les choses ne sont jamais aussi simples et par des arguties spécieuses, l’on peut essayer de démontrer que cet article 6 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen n’est pas enfreint par cette restriction de l’application de la loi réprimant les sévices envers les animaux. En tout cas, cela a été l’avis du Conseil qui a suivi et repris une bonne partie des arguties offertes par les services du Premier ministre.

La corrida : un acte de cruauté envers un animal que la loi reconnait et accepte….

Il est remarquable que dans toute cette bataille juridique, il est admis qu’il s’agit d’une restriction du champ d’application de la loi et donc que les corridas sont des actes de barbarie envers les animaux. Du point de vue du droit, elles sont des actes barbares conformes à une loi, elle-même conforme à la constitution !!! La restriction formulée en 1951 dans l’alinéa 7 l’a été parce que la République n’arrivait pas à faire appliquer aux courses de taureaux la loi du 2 juillet 1850 réprimant les mauvais traitements exercés publiquement envers les animaux domestiques. Comme le rappelle d’ailleurs l’argumentaire du Premier ministre, « la Cour de cassation avait constamment jugé, sous la IIIe République, que cette loi s’appliquait aux courses de taureaux, considérés comme des animaux domestiques (v. Crim. 16 février 1895, rapport d’Accarias, D.P. 1895.1. 269; Crim. 17 octobre 1895, D.P., 1895.1. 543, Crim. 4 novembre 1899, D.P. 1901.1. 88; Crim. 8 avril 1922, D.P. 1922. 1.293 ; Ch._Réun. l3juin 1923, D.P. 1923. 1. 119 ; Crim. 23 mars 1937, D.P. 1937. 1. 105). En dépit de cette jurisprudence constante (solennellement confirmée par l’arrêt des chambres réunies de 1923), et d’instructions du ministère de l’intérieur interprétant la loi dans le même sens (circulaires du ministre de l’Intérieur aux préfets du 27 juin 1884 et du 15 juillet 1891), les courses de taureaux avaient perduré dans les régions où elles étaient devenues traditionnelles, en bénéficiant de la tolérance de nombre de maires et du refus des juges du fond de suivre la jurisprudence de la Cour de cassation.»

…mais qui est inacceptable aujourd’hui

Pour les services du Premier ministre et pour le Conseil constitutionnel qui leur a emboîté le pas, le maintien de ce régime d’exception pour les courses de taureaux répondrait au même souci qu'en 1951 : l'apaisement politique et social. C’est la recherche d’un tel apaisement qui constituerait le motif d’intérêt général fondant la restriction d’application de la loi sur la maltraitance des animaux domestiques. En reprenant les motifs qui ont inspiré le législateur, il y a plus de 60 ans, les services du Premier ministre ignorent, ou plutôt ne veulent pas reconnaître, l’évolution des mentalités. L’interdiction des corridas n’entrainerait aucun trouble de l’ordre public car même dans les régions dites de tauromachie, les populations ne sont plus attachées à cette barbarie. Elles la condamnent même, comme à Alès par exemple. Si les locaux étaient si attachés à cette prétendue tradition, les corridas ne seraient pas un spectacle qui est toujours plus ou moins lourdement déficitaire (comparer avec le foot ou même le rugby !). Enfin, tous les sondages montrent que les Français sont majoritairement contre les corridas. Si trouble social il doit y avoir, cela sera dû au maintien de ces spectacles ignobles et l’intérêt général invoqué par JM Ayrault n’est en fait que l’intérêt particulier, financier de ceux qui profitent de la manne touristique engendrée par ces spectacles sanguinaires. En s’appuyant sur l’historique des modifications de la loi réprimant la maltraitance des animaux, il était tout à fait possible de montrer que les raisons d’introduire une restriction d’application de cette loi en faveur de la tauromachie n’avaient plus cours, que cette restriction ne correspondait plus à l’intérêt général et devait donc être levée. Cela n’a pas été le cas.

Il faut changer la loi

La loi actuelle ne permet pas d’interdire les corridas. Cette loi est conforme à la Constitution puisqu’en a déclaré ainsi le Conseil constitutionnel. Il faut donc la changer ou plutôt rédiger une loi nouvelle qui interdise sans ambiguïté ou échappatoires cette barbarie sanguinaire. C’est ce que va faire une députée PS, Geneviève Gaillard. Avec sa collègue UMP Muriel Marland-Militello, elle avait déjà été à l’origine d’un projet de loi abolitionniste qui n’avait pas été débattu. Souhaitons que nombre des parlementaires nouvellement élus cosignent ce nouveau projet pour que cette fois, il soit enfin soumis au parlement. Ce n’est pas certain car tous les projets de loi abolissant la corrida posés chaque année n’ont jamais été débattus. Le lobby pro-corrida à l’assemblée est redoutable, diablement efficace.

Continuons le combat !

Les associations anti-corrida ne baissent pas les bras. Plusieurs actions en justice sont encore en cours et elles vont en appeler à la Cour européenne de justice. Il faut leur apporter tout notre soutien tant pour ces procédures judiciaires que lors des manifestations ou autres actions auxquelles il faut participer dans la mesure de nos possibilités.
En attendant, les taureaux continueront de mourir le dimanche.


Compléments

1 – Une couverture médiatique partiale
La façon dont les grands médias ont rapporté la décision du Conseil constitutionnel est consternante : une chaîne de télé ne trouve rien de mieux que d’inviter un ancien matador, directeur d’arènes pour commenter l’événement . La veille, une autre chaîne avait présenté le sondage le moins favorable aux abolitionnistes qui restaient tout de même largement majoritaire et concluait que les Français étaient divisés sur la question. Etrange commentaire : le présentateur aurait pu tout aussi bien conclure qu’en cas de référendum, c’est l’abolition qui triompherait, ce qu’il s’est bien gardé de faire. Mise à part France-Info, la tonalité était plutôt pro-corrida, comme si les journalistes aimaient eux aussi que ça saigne…
Il faut que la corrida soit impopulaire pour que l’opinion abolitionnisme reste majoritaire malgré tout ce matraquage. Le pompon doit être décerné à Nice-Matin. Dans l’article qui rend compte de l’affaire les avis des pour et des contre sont assez bien équilibrés et correctement rendus mais cet équilibre n’est qu’un moyen de donner du poids au commentaire du journaliste ignare, pro-corrida, qui affirme sans vergogne que, dans la confrontation entre partisans et adversaires de la tauromachie, ce sont les abolitionnistes qui sont les violents. Ignorerait-il qu’à Rodilhan près de Nîmes, le 8 octobre 2011, 95 militants abolitionnistes qui manifestaient pacifiquement contre la tenue d’une corrida ont été gravement molestés par des afficionados déchaînés ? Ne se souviendrait-t-il pas non plus de ces nombreux cas de militants abolitionnistes frappés par des partisans des corridas ? Pourrait-il citer un seul cas inverse ? D’autres journaux locaux où à vocation locale ont été plus objectifs. Mais comme chez les politiques et contrairement aux citoyens, les journalistes ou leur rédaction ont dans leurs rangs une majorité de pro-corrida qui ne manque pas une occasion pour tenter de convertir les gens à leur cause.

2 – Les atermoiements d’Eva Joly versus l’engagement de Nicolas Hulot
Elle est toujours aussi peu claire sur le sujet. On se souvient de ses prises de positions contradictoires lors de la campagne présidentielle. Eh bien, cela n’a pas changé. Le 21 septembre, elle s'est prononcée pour l'interdiction de la corrida en France, mais « à terme » : « je souhaite interdire la corrida à terme, mais je pense qu'il est important aussi qu'il y ait encore des débats autour de la question » Elle a ajouté : « Il s'agit d'une tradition mais une tradition qui heurte la sensibilité à la condition animale. Nous voulons aujourd'hui qu'en France, nous respections les droits des animaux » Comprenne qui pourra ! Une telle ambigüité signifierait-elle que certains membres d’Europe Ecologie – Les Verts, amis d’Eva Joly – Noël Mamère par exemple – seraient du côté des partisans de la tauromachie ? Face à ces déclarations confuses voulant concilier l’inconciliable, il est bon de rappeler la position de Théodore Monod qui affirmait «La corrida est le symbole cruel de l’asservissement de la nature par l’homme » C’est pourquoi, n’en déplaise à Madame Joly et à certains membres d’Europe Ecologie /Les Verts, on ne peut à la fois être écologiste et accepter cette barbarie. Dans ses déclarations télévisées, Nicolas Hulot, lui, a clairement condamné ce spectacle de mort. « Le fait d'ôter la vie ne peut pas être source de plaisir ou de spectacle, ce n'est pas digne d'une civilisation... » a-t-il déclaré.

La corrida ne sera pas abolie. La torture en public d’un taureau est conforme à la constitution…
3 – Attendre l’accident pour interdire ?


Dans les premiers moments j'ai cru
Qu'il fallait seulement se défendre
Mais cette place est sans issue
Je commence à comprendre
Ils ont refermé derrière moi
Ils ont eu peur que je recule
Je vais bien finir par l'avoir
Cette danseuse ridicule...




Francis Cabrel, La Corrida



Il arrive, très rarement, que le matador se fasse embrocher. C’est en général sans trop de gravité mais cela peut être mortel. Si de tels accidents se produisaient aujourd’hui, quelle serait l’attitude des pouvoirs publics ?

Annexe

Voici les textes des interventions des porte-paroles des services du Premier ministre, devant le Conseil constitutionnel et le texte de la décision de ce dernier avec ses attendus. Le lecteur pourra voir à quel point et avec quelle insistance, le Premier ministre a pesé pour faire rejeter la requête des associations anti-corrida. Il pourra en évaluer par lui-même les arguties et mesurer combien certains arguments avancés par JM Ayrault sont obsolètes ou de mauvaise foi. Par comparaison des textes, il pourra constater que ce sont ces arguments que le Conseil constitutionnel a repris pour justifier sa décision. Comment ne pas penser que les dés étaient pipés et que tout était joué d’avance ?

Textes présentés par le Premier ministre pour rejeter la requête des associations CRAC et Droit des animaux

▪ Premier argumentaire Contre la QPC des associations anticorrida.

Par une décision du 20 juin 2012, le Conseil d’État a renvoyé au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution de l'article 521-1 du code pénal qui réprime le fait d’exercer, publiquement ou non, des sévices graves ou sexuels sur un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, ou un acte de cruauté.
La question - soulevée à l'occasion d'une demande en annulation de la décision par
laquelle le ministre chargé de la culture a inscrit, en application de l’article 12 de la convention de l'UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, la corrida au patrimoine immatériel de la France - conteste spécialement, au regard du principe de l'égalité devant la loi, la première phrase de l’antépénultième alinéa de l'article 521-l qui prévoit une exception à l'incrimination au profit des « courses de taureaux lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée »
Le Conseil d’État a estimé que le moyen tiré de ce que, en prévoyant que les "faits qu'il réprime ne sont pas pénalement sanctionnés lorsqu'ils sont commis selon des pratiques traditionnelles" locales, l’article 521-1 du code pénal serait contraire aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au principe d'égalité devant la loi, soulevait une question sérieuse.
Cette question appelle de ma part les observations suivantes.

1. L'antépénultième alinéa de l'article 521-1 du code pénal a pour objet d’instituer, dans un but d'apaisement politique et social, une exception applicable aux courses de taureaux pratiquées selon une tradition locale ininterrompue.

l.l. L'application aux courses de taureaux de la loi du 2 juillet I850 réprimant les
mauvais traitements exercés publiquement envers les animaux domestiques s’est heurtée à de constantes difficultés en raison de l’attachement des populations de certaines régions à ces pratiques.
En vertu de la loi du 2 juillet 1850 relative aux mauvais traitements exercés envers les animaux domestiques, appelée loi Grammont, étaient passibles d’une peine d'amende et d’un à cinq jours d’emprisonnement « ceux qui auront exercé publiquement et abusivement de mauvais traitements envers les animaux domestiques » (D.P. 1850.4- 145).
La Cour de cassation avait constamment jugé, sous la IIIè République, que cette loi
s’appliquait aux courses de taureaux, considérés comme des animaux domestiques (v. Crim. 16 février 1895, rapport d’Accarias, D.P. 1895.1. 269; Crim. 17 octobre 1895, D.P., 1895.1. 543, Crim. 4 novembre 1899, D.P. 1901.1. 88; Crim. 8 avril 1922, D.P. 1922. 1.293 ; Ch._Réun. l3juin 1923, D.P. 1923. 1. 119 ; Crim. 23 mars 1937, D.P. 1937. 1. 105).
En dépit de cette jurisprudence constante (solennellement confirmée par l’arrêt des
chambres réunies de 1923), et d’instructions du ministère de l’intérieur interprétant la loi dans le même sens (circulaires, du ministre de Pintérieur aux préfets du 27 juin 1884 et du 15 juillet 1891), les courses de taureaux avaient perduré dans les régions où elles étaient devenues traditionnelles, en bénéficiant de la tolérance de nombre de maires et du refus des juges du fond de suivre la jurisprudence de la Cour de cassation.
La plupart des juridictions locales retenaient en effet une interprétation contraire à celle de la Cour de cassation en excluant l'application de la loi Grammont aux courses de taureaux au motif, notamment, que ces derniers ne pouvaient être qualifiés d’animaux domestiques, alors seuls visés par le législateur.
Il en a été ainsi jusqu’à la veille de l'adoption de la loi du 24 avril 1951 (V. le jugement du tribunal de simple police de Bayonne du 9 août 1950 affirmant que le taureau de combat n’est pas un animal domestique, D.P. 1950.2. 671), laquelle a été adoptée dans le but de permettre, sous certaines conditions, les courses de taureaux.

1.2. Considérant la pratique ancienne et constante de courses de taureaux dans certaines régions et la difficulté de les y interdire de manière effective, le législateur a estimé qu’il était d’intérêt général de consacrer dans la loi la tolérance dont elles bénéficiaient en pratique, en instaurant une exception à l’incrimination subordonnée à Pexistence d’une tradition ininterrompue.
A cette fin, le législateur a modifié la loi Grammont, par la loi du 24 avril 1951, en
disposant qu’elle ne serait pas applicable aux courses de taureaux « lorsqu’une tradition ininterrompue peut être invoquée ».
Ainsi qu’ il ressort des travaux préparatoires, cette disposition a été adoptée par un souci d’apaisement politique et social, tenant compte de l’attachement constant de certaines populations aux courses de taureaux.
L’« intérêt même de l’ordre public » a été expressément considéré (Conseil de la
République, séance du 10 avril 1951, rapport de Jean Biatarana, annexe n° 241).
Il a été ainsi relevé que «tous les efforts des pouvoirs publics, en vue d’essayer
d’empêcher les courses de taureaux, [étaient] restés vains, au point de se heurter parfois à de véritables révoltes » (Assemblée nationale, séance du 26 juillet 1950, rapport de Joseph Defos du Rau, annexe n° 10764).
Après un nouvel examen, le législateur a confirmé cette exception lorsqu'il a institué, dans la loi n° 63-1143 du 19 novembre 1963 relative à la protection des animaux, le délit d’acte de cruauté commis envers un animal domestique ou apprivoisé ou tenu en captivité (article 453 du code pénal devenu l'article 521-1), les mauvais traitements étant désormais constitutifs d'une contravention réprimée par les dispositions de l’article R. 38 du code pénal issues du décret n° 59-1051 du 7 septembre 1959 qui abroge la loi Grammont (article R. 38 devenu l’article R. 654-1).
Ce «régime de la tolérance maintenue », selon les termes du rapporteur à l’Assemblée
nationale, Max Moras (séance du 12 juillet 1961), a été considéré comme une «thèse
conciliatrice » (Jean-Marie Commenay; même séance), se situant entre l'interdiction totale et l'extension généralisée à l’ensemble du territoire de l'exception d’incrimination.
Le maintien de ce régime répond au même souci d'apaisement politique qu'en 1951.
Il a été ainsi fait référence au « conflit permanent entre le pouvoir central et les maires » au sujet des courses de taureaux avant que celles-ci ne soient permises par la loi du 24 avril 1951 (Max Moras, séance du 12 juillet 1961).

2. L'article 521-1 du code pénal ne méconnaît pas le principe de l’égalité devant la loi.

Les dispositions contestées instituent deux différences de traitement cumulatives : d’une part, selon que les animaux participent à des courses de taureaux ou non ; d’autre part, selon que les courses de taureaux résultent de traditions locales ininterrompues ou non.
Il ressort de la jurisprudence du Conseil constitutionnel que «le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit» (v., dernièrement, 1a décision n° 2012-259 QPC du 29 juin 2012).

2.1. En premier lieu, l'exception prévue par les dispositions contestées pour les courses de taureaux répond à un motif d’intérêt général en rapport direct avec l’objet de la loi qui l'institue.
Ainsi que cela a été énoncé précédemment, l'exception prévue par les dispositions
contestées pour les courses de taureaux répond à un souci d'apaisement politique et social, qui constitue un motif d’intérêt général. Il a été d’ailleurs souligné au cours des travaux préparatoires de la loi du 24 avril 1951 que cette exception présentait à cet égard « un intérêt public évident » (Assemblée nationale, séance du 26 juillet 1950, rapport de Jules Ramarony et de Jean Sourbet, annexe n° 10764).
L'article 61-1 de la Constitution, à l'instar de l'article 61, ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement (v. décision n° 2011-173 QPC du 30 septembre 2011, à propos de la prise en compte, en matière d’exhumation à fin d'identification par empreinte génétique, du respect dû au corps humain; décision n° 2012-248 QPC du 16 mai 2012, s’agissant de l'équilibre défini par le législateur entre les intérêts de la mère de naissance et ceux de l'enfant en cas d’accouchement dans le secret ; décision n° 2001-446 DC du 27 juin 2001, à propos de dispositions portant de dix
à douze semaines de grossesse le délai pendant lequel peut être pratiquée une interruption volontaire de grossesse lorsque la femme enceinte se trouve, du fait de son état, dans une situation de détresse).
En l'occurrence, il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur les motifs d’intérêt général qu’il a ainsi retenus pour justifier une exception à des dispositions réprimant les sévices et les actes de cruautés relatifs à certains animaux, dès lors qu’une telle exception ne prive par elle-même de garantie légale aucune exigence constitutionnelle.

2.2. En second lieu, la différence de traitement instituée par les dispositions contestées selon que les courses de taureaux sont pratiquées, ou non, d’après une tradition locale ininterrompue correspond à une différence de situation et est en rapport direct avec l’objet de la loi.
Ainsi que cela a été souligné, l’objet de l'exception contestée est de « maintenir la tolérance » dont bénéficiaient les courses traditionnelles dans un souci d’apaisement.
Il n’a nullement été dans l’intention du législateur de permettre l’ « extension » des courses de taureaux dans l’ensemble du territoire.
Si le bénéfice de l’exception a été subordonnée à la condition de l’existence d’une
«tradition ininterrompue » par la loi du 24 avril 1951, puis à celle d’une «tradition locale ininterrompue » par la loi du 19 novembre 1963 (qui reprend sur ce point les termes du décret du 7 septembre 1959, qui précisent la portée des termes d’origine en ajoutant l’épithète « local»), c’était afin de la voir appliquée dans les seuls cas où les motifs d’intérêt général retenus par le législateur le justifiaient.
Il convient à cet égard de préciser qu’un même lieu peut, si cette tradition venait à s’interrompre, perdre le bénéfice de cette exception, ce qui correspond à la volonté du législateur d’instituer un « régime de tolérance maintenue » qui ne vaut que pour autant que les circonstances de fait le justifient toujours, et non un droit à pratiquer des courses de taureaux.
Au regard de l’objet de la loi, les courses de taureaux qui ne s’inscrivent pas dans une tradition locale ininterrompue se trouvent ainsi dans une situation différente.
Le grief tiré de la méconnaissance du principe de l’égalité devant la loi est par conséquent infondé.

Pour l'ensemble-de ces raisons, j’ai l’honneur d’inviter le Conseil constitutionnel à déclarer conforme à la Constitution l’article 521-1 du code pénal. Pour le Premier ministre et par délégation,
La chef du service de la législation et de la qualité du droit

Florence Dubois-Stévant


▪ OBJET : Secondes observations relatives à la question prioritaire de constitutionnalité n° 2012-271 QPC

Le mémoire que vous avez bien voulu me communiquer par un courrier du 13 juillet 2012 n’est pas de nature à remettre en cause les observations qui ont présentées pour le Premier ministre sur cette question prioritaire de constitutionnalité.
J ’ajouterai cependant les observations complémentaires suivantes, en vue de répondre à un nouveau grief, tiré de la méconnaissance des «principes de clarté et de précision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique».
D’une part, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, « la
méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution» (décision 2012-230 QPC du 6 avril 2012, cons. 6 ; décision 2011-175 QPC du 7 octobre 2011, cons. 9).
D’autre part, même présenté au soutien du grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité, ce nouveau grief ne peut être regardé comme fondé.
Le Conseil constitutionnel a en effet examiné à au moins deux reprises des dispositions législatives se référant à l'existence de traditions locales pour définir l'étendue d’obligations dont la méconnaissance est sanctionnée pénalement.
Il a ainsi examiné, dans sa décision n° 2000-434 DC du 20 juillet 2000 (cons. 41 et 42), l’article 28 de la loi relative à la chasse insérant dans le code rural un nouvel article L. 224-4-1 autorisant la chasse au gibier d'eau, la nuit, à partir de postes fixes dans les départements et les cantons des départements où cette pratique est traditionnelle, en écartant le grief tiré d'une atteinte au principe d’égalité, alors que l’article L. 228-5, dans sa rédaction issue de la même loi, punissait de l’amende prévue pour les contraventions de la 5° classe et d’un emprisonnement de dix jours à un mois ceux qui auront chassé la nuit dans des conditions autres que celles visées à l’article L. 224-4-1.
Il convient de préciser que si ces dispositions examinées énuméraient tous les départements où la chasse de nuit du gibier d’eau est traditionnelle, elles confiaient également le soin au pouvoir réglementaire de fixer la liste des cantons des départements où cette pratique est traditionnelle, sans, par conséquent, la préciser elles-mêmes. Le Conseil constitutionnel a énoncé à cet égard qu' « il appartiendra au pouvoir réglementaire d’arrêter cette liste, sous le contrôle du juge administratif, dans le respect du critère énoncé par la loi ».
Le Conseil constitutionnel a également examiné, dans sa décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991 (cons. 23 à 41), des dispositions de l’article 10 de la loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme conférant à l'article L. l7 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme une rédaction nouvelle qui autorise certaines formes de publicité ou de propagande en faveur des boissons alcooliques, toute autre forme faisant l’objet d’une interdiction pénalement sanctionnée par les dispositions de l’article L. 21.
Ces dispositions, figurant désormais à l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, prévoient une autorisation en faveur « des fêtes et foires traditionnelles consacrées à des boissons alcooliques locales et à l’intérieur de celles-ci, dans des conditions définies par décret ».
Le Conseil constitutionnel a examiné ces dispositions qu”il a déclarées conformes à la Constitution. Il a d’ailleurs expressément écarté le grief tiré de l’atteinte au principe d’égalité, en énonçant que « l’article L. 17 nouveau n’a pas méconnu le principe d’égalité devant la loi, en n’admettant le recours à l'affichage publicitaire en faveur des boissons alcooliques que dans les zones de production ou pour promouvoir des fêtes et foires traditionnelles... » (cons. 35).

Pour ces raisons, et celles qui ont été énoncées dans les premières observations, j’ai l’honneur d’inviter le Conseil constitutionnel à déclarer conforme à la Constitution l’article 521-1 du code pénal.

Pour le Premier ministre et par délégation,
Le directeur, adjoint au secrétaire général du Gouvernement.
Thierry-Xavier Girardot


Ces deux textes sont en ligne sur le site du CRAC

La décision du Conseil constitutionnel

Décision n° 2012−271 QPC du 21 septembre 2012
Association Comité radicalement anti−corrida Europe et autre [Immunité pénale en matière
de courses de taureaux]

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 21 juin 2012 par le Conseil d'État (décision n° 357798 du 20 juin 2012), dans les conditions prévues à l'article 61−1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par l'association « Comité radicalement anti−corrida Europe » et l'association « Droits des animaux », relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 521−1 du code pénal.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58−1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code pénal ;
Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Vu les observations produites pour les associations requérantes par Me Éric Verrièle, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 11 et 27 juillet 2012 ;
Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées les 13 et 30 juillet 2012 ;
Vu les observations en intervention produites pour les associations « Observatoire national des cultures taurines » et
« Union des villes taurines de France », par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 12 et 27 juillet 2012 ;
Vu la demande de récusation présentée par les requérants, enregistrée le 11 juillet 2012 ;
Vu les pièces produites et jointes au dossier ;
Me Verrièle, pour les associations requérantes, Me Emmanuel Piwnica pour les associations intervenantes et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 11 septembre 2012 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 521−1 du code pénal : « Le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
« En cas de condamnation du propriétaire de l'animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal statue sur le sort de l'animal, qu'il ait été ou non placé au cours de la procédure judiciaire. Le tribunal peut prononcer la confiscation de l'animal et prévoir qu'il sera remis à une fondation ou à une association de protection animale reconnue d'utilité publique ou déclarée, qui pourra librement en disposer. « Les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent article encourent également les peines complémentaires d'interdiction, à titre définitif ou non, de détenir un animal et d'exercer, pour une durée de cinq ans au plus, une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l'infraction. Cette interdiction n'est toutefois pas applicable à l'exercice d'un mandat électif ou de responsabilités syndicales.
« Les personnes morales, déclarées pénalement responsables dans les conditions prévues à l'article 121−2 du code pénal, encourent les peines suivantes :
« − l'amende suivant les modalités prévues à l'article 131−38 du code pénal ;
« − les peines prévues aux 2°, 4°, 7°, 8° et 9° de l'article 131−39 du code pénal.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie.
« Est punie des peines prévues au présent article toute création d'un nouveau gallodrome.
« Est également puni des mêmes peines l'abandon d'un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, à l'exception des animaux destinés au repeuplement » ;
2. Considérant que, selon les associations requérantes, en prévoyant pour les courses de taureaux une exception à la répression pénale instituée par le premier alinéa de l'article 521−1 du code pénal, les dispositions du septième alinéa de ce même article portent atteinte au principe d'égalité devant la loi ;
3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur la première phrase du septième alinéa de l'article 521−1 du code pénal ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi...doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration de 1789 l'obligation de fixer lui−même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire ;
5. Considérant que le premier alinéa de l'article 521−1 du code pénal réprime notamment les sévices graves et les actes de cruauté envers un animal domestique ou tenu en captivité ; que la première phrase du septième alinéa de cet article exclut l'application de ces dispositions aux courses de taureaux ; que cette exonération est toutefois limitée aux cas où une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ; qu'en procédant à une exonération restreinte de la responsabilité pénale, le législateur a entendu que les dispositions du premier alinéa de l'article 521 1 du code pénal ne puissent pas conduire à remettre en cause certaines pratiques traditionnelles qui ne portent atteinte à aucun droit constitutionnellement garanti ; que l'exclusion de responsabilité pénale instituée par les dispositions contestées n'est applicable que dans les parties du territoire national où l'existence d'une telle tradition ininterrompue est établie et pour les seuls actes qui relèvent de cette tradition ; que, par suite, la différence de traitement instaurée par le législateur entre agissements de même nature accomplis dans des zones géographiques différentes est en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'en outre, s'il appartient aux juridictions compétentes d'apprécier les situations de fait répondant à la tradition locale ininterrompue, cette notion, qui ne revêt pas un caractère équivoque, est suffisamment précise pour garantir contre le risque d'arbitraire ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité doit être rejeté ; que la première phrase du septième alinéa de l'article 521−1 du code pénal, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclarée conforme à la Constitution,

D É C I D E :

Article 1er.− La première phrase du septième alinéa de l'article 521−1 du code pénal est conforme à la Constitution.
Article 2.− La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23−11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 septembre 2012, où siégeaient : M. Jean−Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 21 septembre 2012.
20.09.2012

Lundi 24 Septembre 2012 Commentaires (0)
Dans un article déjà ancien de la Revue d’Auvergne (1989, 517 – 518, pp. 249 – 271) les auteurs Y. Lageat et R. Neboit-Guilhot mettent en avant le concept de ‘contrainte’ défini comme « entrave à la liberté d’action » pour analyser « les rapports que des sociétés entretiennent avec le milieu géographique qu’elles occupent dès lors qu’il ne s’identifie pas avec l’espace uniforme et lisse que présupposent certains modèles abstraits » (p.249). Modulo une généralisation et quelques modifications, ce concept et cette approche sont utilisés dans cet article pour spécifier et mettre en évidence certains traits distinctifs de l’attitude écologiste, sa ressemblance avec celle de peuples premiers, sa radicale différence avec l’attitude dominante dans la civilisation occidentale moderne et contemporaine, sa parenté avec la marche de l’évolution et donc sa capacité créatrice. Enfin, l’approche des changements climatiques en termes de contraintes permet de mettre en évidence l’impossibilité de prévoir l’impact positif ou négatif de ces changements sur les activités humaines et d’expliquer pourquoi il en est ainsi.

La notion de ‘contrainte à agir’

●Les différents types de contraintes
Les contraintes à agir ainsi comprises peuvent avoir de multiples origines. Pour ce qui concerne les contraintes naturelles, les auteurs en distinguent trois sortes : d’abord, des contraintes qu’ils qualifient de « statiques » « inhérentes à des données permanentes et stables du milieu ». Le second type de contraintes, les contraintes « aléatoires », que les auteurs envisagent, ce sont les aléas d’ordre divers, apparentés à des risques naturels et associés à des événements météorologiques exceptionnels, tels que les tempêtes, les sécheresses exceptionnelles en relation avec des événements météorologiques ou des accidents climatiques aléatoires. Le troisième qu’ils appellent «contraintes de rétroactions» comprend celles induites par « certaines modifications apportées par l’homme lui-même à son environnement qui s’avèrent porteuses d’effets pervers », sorte de « choc en retour d’actions exercées par l’homme sur le milieu. »
●La notion de liberté d’agir
Chez les auteurs, la notion de «contrainte à agir» et son contraire «la liberté d’agir» sont anthropocentrés. Pour leur propos et le sujet de leurs analyses, cela est naturel. On peut cependant généraliser l’approche de la relation au milieu géographique que ces notions impliquent à tous les individus, ou groupes d’individus vivants, humains ou non pour peu que l’on comprenne la liberté d’agir comme distincte, bien que les englobant, des conduites supposées résulter d’une délibération volontaire ou d’un libre arbitre. Par exemple, un lieu qui fournit à une espèce d’oiseau nourriture en suffisance, endroits pour construire son nid et élever sa nichée sera un lieu qui permet à l’oiseau de jouir de sa liberté d’action. Ces actions ne relèvent évidemment pas d’une délibération volontaire et sont pour l’essentiel des conduites génétiquement programmées et/ou motivées. Il n’est cependant pas contre-intuitif, de considérer que si l’oiseau peut les mener à bien, il a été libre d’agir. Si le milieu géographique où il vit est aussi celui d’un mammifère amateur d’œufs, l’oiseau devra « en tenir compte » sous peine de voir sa couvée échouer. L’existence de tels prédateurs coexistant dans le même lieu est une contrainte à la liberté d’agir de l’oiseau. Un animal sauvage qui agit selon sa nature possède une liberté d’agir dont a été dépossédé un animal domestiqué et dressé. C’est à cette liberté d’agir détruite par la domestication qu’est attaché le loup de la fable.
●Le paradoxe de la Reine Rouge
D’autre part, il faut relativiser l’idée de contraintes physiques immuables du milieu géographique et ne pas oublier le ‘paradoxe de la Reine Rouge’ où Alice et ladite Reine doivent courir sans cesse pour rester à la même place, ce qui représente l’évolution. Les données physiques d’un milieu géographiquement situé changent elles aussi. D’ailleurs les auteurs le reconnaissent au moins en partie lorsqu’ils envisagent les contraintes de rétroaction. Par contre, si les contraintes aléatoires induisent aussi des changements, ceux-ci ne sont envisagés que comme des perturbations temporaires du « cours ordinaire de la vie » qui pourra reprendre au bout d’un temps plus ou moins long. Un changement de contraintes induites par un changement durable voire définitif du milieu n’est pas explicitement envisagé. Cela peut s’expliquer par le fait que de telles évolutions n’entrent pas dans le champ du sujet étudié dans l’article qui traite à partir de l’exemple de l’Auvergne, des «contraintes physiques en moyenne montagne » En outre, excepté le cas d’un changement brutal catastrophique, le milieu physique naturel n’évolue pas toujours d’une manière perceptible à l’échelle d’une génération.
●Les contraintes à agir comme entités relationnelles
Les auteurs estiment qu’il n’y a pas de déterminisme inéluctable et invariable dans la façon dont les contraintes pèsent sur les activités humaines. « Fussent-elles associées à des données permanentes, les contraintes n’ont d’incidences réelles que par rapport à tel ou tel mode d’occupation du sol, telle ou telle activité économique » Ce sont des entités relationnelles susceptibles d’évoluer au cours du temps. « Aptitudes et contraintes sont des notions éminemment relatives » considèrent-ils. Relatives à la manière dont le milieu est utilisé et /ou modifié, relatives au temps au cours duquel un groupe peut l’utiliser successivement de différentes manières. De même qu’il n’y a pas de déterminisme inéluctable et invariable dans la façon dont ces contraintes pèsent sur les activités humaines, il n’y en a pas sur la façon dont elles pèsent sur celles des autres espèces. Face à une pénurie dans la ressource, son indisponibilité provisoire ou définitive, plusieurs stratégies sont possibles : limitation des naissances ou des individus du groupe, changement de comportement alimentaire, migrations saisonnières, etc. La différence ici vient que pour de nombreuses espèces, ces stratégies diverses sont le fruit de mécanismes évolutifs et sont fréquemment génétiquement préprogrammées avec quelque souplesse cependant sans laquelle elles perdraient toute efficacité. Par exemple, des espèces migratrices peuvent se sédentariser sur un territoire ou inversement devenir migratrices et quitter ce territoire certaines saisons. Enfin, il n’est pas inutile de préciser que les contraintes sont celles d’un type de milieu dans un lieu géographiquement situé.

Applications

1 – Sagesse écologique versus arrogance prométhéenne ; la spécificité de l’homme occidental
Peut-on considérer comme ‘naturelle’, une contrainte de rétroaction telle que définie par les auteurs ? Ce qui est naturel est, par convention, indépendant de toute action humaine. Prenons par exemple une contrainte liée aux risques d’éboulement de terrain. Elle peut être due à des facteurs tels que la nature du terrain, l’inclinaison de la pente, l’altitude qui interdit une végétalisation suffisante et pérenne, combinée à la violence des précipitations en ce lieu hostile. Cette contrainte est naturelle et rentre dans la première des catégories distinguées. Une contrainte du même type peut être due à une déforestation des pentes liées à une surexploitation du milieu résultant elle-même d’une surpopulation du secteur géographique considéré, une vallée alpine au XIXème siècle par exemple. Dans les deux cas, il s’agit de contraintes « physiques » mais dans le second, Il s’agit d’un risque d’origine anthropique que l’on ne peut qualifier de naturel précisément parce qu’il est d’origine anthropique.
Cependant tout individu ou groupe d’individus d’une espèce quelconque apporte à son milieu des modifications, si insignifiantes soient-elles pour certains d’entre eux. Elles ont pour but, conscient ou non, soit de le rendre propice à leur survie, soit sont la conséquence de l’utilisation des ressources qu’ils y trouvent pour assurer leur subsistance. Ces modifications peuvent ou non induire de nouvelles contraintes, être favorables ou neutres. Si l’on veut considérer ces contraintes physiques de rétroaction comme des contraintes naturelles, il faut éviter de traiter l’espèce humaine, l’homme, comme une espèce à part. C’est possible bien que l’espèce humaine ait la particularité d’apporter des modifications à son milieu qui sont de véritables transformations. Aujourd’hui dans la civilisation occidentale, elles peuvent être si poussées qu’elles lui permettent de pouvoir rendre habitable pour elle-même tout lieu de la surface terrestre et même au-delà. L’espèce humaine est donc celle qui a développé une civilisation capable de s’affranchir le plus complètement, mais évidemment jamais totalement, des contraintes physiques en n’importe quel lieu géographique où se trouve quelques-uns de ses membres. Mais cette médaille a un revers : plus cet affranchissement est poussé, plus le milieu doit être transformé avec des effets pervers aussi indésirables qu’inéluctables et imprévus, l’homme occidental subissant comme une sorte de choc en retour de nouvelles contraintes, des contraintes rétroactives au sens des auteurs, plus lourdes encore que celles dont il a voulu s’affranchir. S’il existe une particularité de cette espèce telle qu’elle s’est développée dans la civilisation occidentale, elle est là. Elle est la seule à être parfois capable de s’affranchir des contraintes physiques de son milieu géographique, ou du moins de passer outre et de se voir confrontée en retour à d’autres contraintes physiques plus lourdes et de les faire peser sur d’autres civilisations et d’autres espèces qu’elle-même. La généralisation d’une notion appliquée d’abord aux actions des sociétés humaines à toute action d’individu et de groupe humain ou non, permet de mettre en évidence qu’entre l’espèce humaine et les autres espèces, il y a à la fois continuité et rupture. Continuité parce que les uns et les autres subissent le poids des contraintes physiques du lieu géographique dans lequel ils vivent et doivent compter avec. Rupture car alors que les espèces non-humaines n’ont d’autre choix que de s’adapter, les hommes peuvent aussi tenter de s’en affranchir, ce qui est le cas de la civilisation occidentale depuis au moins deux siècles… mais avec une telle attitude, les ennuis commencent et le poids de nouvelles contraintes se font durement sentir, les contraintes de rétroaction apparaissent de plus en plus pesantes.
Certes, les hommes n’ont pas l’exclusivité d’introduire dans leur milieu de vie des modifications porteuses d’effets inattendus et pervers pour eux-mêmes et d’autres mais peu d’espèces ne l’ont fait avec autant d’ampleur. Et parmi les groupes humains, il faut encore distinguer. Il existe des ‘peuples premiers’ qui savent utiliser la nature qui les entoure tout en en prenant soin grâce à leur sagesse immémoriale. Ce qui n’est pas le cas de l’homme occidental qui l’épuise et la souille. S’adapter aux contraintes du lieu, c’est sagesse écologique, les ignorer ou croire et vouloir s’en affranchir, c’est faire preuve soit d’ignorance, soit d’une arrogance démesurée bien illustrée par le mythe de Prométhée ou de celui d'Icare qui voulait s’affranchir de la pesanteur(*).
Les ingénieurs des ponts et chaussées tracent le réseau d’autoroutes en gommant les reliefs, taillant dans le vif des montagnes, les creusant, en effaçant rivières et vallées par des viaducs gigantesques par brute force et dans une débauche d’énergie, héritiers de ceux qui tissèrent le réseau de voies ferrées au XIXème siècle à grand renfort de tunnels, de viaducs et autres ouvrages de l’art mais qui composaient encore un peu avec les contraintes géographiques : il s’agissait de s’ingénier à franchir les obstacles, pas de les effacer. Quel contraste avec les voies immémoriales tracées, générations après générations, par les pieds d’innombrables voyageurs ou par ceux de leurs montures et bêtes de somme. Quelle connaissance tacite, quelle intelligence des lieux, quel sens de la pente, du dosage de l’effort, quel à propos dans le choix des passages, des « pas » et des gués ! Le tracé s’adapte à la géographie et la morphologie des lieux traversés, il ne les transforme pas, joue avec les obstacles pour se jouer d’eux, ignorant la ligne droite que les ingénieurs modernes sacralisent et sachant faire un détour, ce que les modernes refusent. Bref, la finesse contre la brutale géométrie.
Alors que l’attitude écologiste vis-à-vis des contraintes naturelles d’un milieu terrestre spécifié est de «s’adapter plutôt que de transformer», celle dominante dans la civilisation occidentale est de «transformer plutôt que s’adapter» Par manque de moyens donc par nécessité, mais aussi par conviction l’attitude de ceux que naguère, l’occidental conquérant appelait «des sauvages» est bien plus proche de la maxime écologiste qui s’avère être pour reprendre le titre d’un ouvrage célèbre une pensée sauvage.

2 – L'adaptation à une contrainte naturelle la neutralise sans créer de contraintes de rétroaction
Il ne faut pas nier que parfois, un groupe vivant dans un lieu donné, n’a, pour diverses raisons, d’autre choix que de tenter de passer outre les contraintes physiques de ce lieu où il vit sans que l’on puisse parler pour autant d’ignorance ou d’arrogance. Tout juste peut-on invoquer l’obstination de s’accrocher à sa terre natale, si ingrate fût-elle. Un pays de moyenne montagne sous un climat marqué d’influences océaniques n’est guère favorable aux cultures et notamment aux cultures céréalières. C’est le cas du Massif Central qui fut pourtant jusqu’à un passé relativement récent «un pays de labour, où l’on pensait à nourrir les hommes avant de nourrir les bêtes. Autant dire que l’on faisait de nécessité vertu» (Lageat Y. et Neboit-Guilhot R., o.c., p. 254) Les contraintes physiques – dans ce cas la nature des sols, l’altitude et le climat – ne permettaient que des rendements céréaliers médiocres et irréguliers surtout lorsque les étés étaient particulièrement « pourris » avec des températures relativement fraîches et beaucoup de précipitations. Les contraintes n’étaient pas ignorées, elles étaient subies. Si l’on ne peut s’affranchir de contraintes telles que celles induites par la géographie physique du lieu, il faut subir ou s’adapter. L’adaptation dans le cas présent signifie développer un autre mode d’utilisation du sol : l’élevage, le fourrage et l’exploitation forestière qui sont en quelque sorte la vocation de ces terres, vocation qui n’a pu s’exprimer que tardivement. Lorsque la région était un « pays de labours », les contraintes et notamment les contraintes induites par le climat n’étaient pas les mêmes que celles d’aujourd’hui où les « surfaces fourragères occupent en Auvergne 80% de la SAU (surface agricole utilisée) » (ibid., p.259). Elles changent de nature. De contraintes « statiques », elles deviennent « aléatoires » L’adaptation aux contraintes climatiques « statiques » d’étés frais et humides les neutralisent en tant que contraintes. On pourrait dire qu’elle les transforme en «conditions» tandis qu’elles étaient des contraintes fortes auparavant. Les contraintes aléatoires redoutées par les laboureurs, les années à fortes précipitations et étés pourris, ne le sont pas ou le sont beaucoup moins pour l’éleveur qui redoute bien plus les années de sécheresses qui étaient bénédiction pour les cultures céréalières : « ceux qui vivaient de la terre redoutaient naguère l’excès d’humidité qui obérait les moissons […] Désormais les calamités naturelles, ce sont les années sèches» (p. 259)(**)

3 – De l’absence de déterminisme climatique sur les activités humaines et en conséquence de l’impossibilité de prédire l’impact d’un changement du climat local sur celles-ci.
Y. Lageat et R. Neboit-Guilhot considèrent dans leur article que le climat est une donnée permanente et stable du milieu. Pour eux, les aléas climatiques comme les années de sécheresse et de chaleur exceptionnelle, ou au contraire les étés pourris et les précipitations diluviennes ne sont que des accidents qui « surviennent sans périodicité fixe ».Ils apportent leurs lots de désolation mais sont temporaires. Le changement climatique ne tenait pas encore le devant de la scène. Néanmoins l’analyse qu’ils font sur le cas du Massif central permet de tirer des leçons concernant les conséquences possibles de ce changement parce qu’elle met bien en évidence l’absence de déterminisme climatique sur des activités qui sont celles qui dépendent le plus des conditions climatiques du lieu où elles s’exercent : l’agriculture.
Une modification dans le mode d’occupation de la SAU modifie les contraintes climatiques, voire même comme le montre le cas traité par les auteurs, les inversent tandis que leur nature même change, le climat lui-même n’étant pas modifié. A l’inverse, pour « répondre » à une modification du climat, on peut concevoir qu’une modification du mode d’occupation de la SAU neutralisera les contraintes nouvelles.
Si incontestablement la forêt demande pour prospérer une humidité certaine, ce n’est pas le cas du fourrage qui réclame aussi du soleil et de la sécheresse en été pour que les foins se déroulent dans de bonnes conditions. Il faut donc nuancer les propos des auteurs sur le fourrage : un été trop pluvieux et froid n’est pas bon pour le fourrage en moyenne montagne, dans les Dores par exemple. Il n’est pas optimum non plus pour le tourisme. Certaines exploitations des Monts Dores sont entièrement consacrées à la production de fourrage avec comme appoint l’hébergement saisonnier pour touristes et estivants. Un climat plus chaud et plus sec serait bénéfique à leur activité, leur permettant d’avoir plusieurs regains et d’exploiter des zones qui lors d’étés un peu pluvieux mais pas forcément «pourris» ne le sont pas. De même chacun sait que le mauvais temps fait fuir le touriste vers des lieux où les cieux sont supposés plus cléments. Enfin, un climat plus chaud et plus sec rendrait peut-être à ces terres de moyenne montagne une vocation céréalière suffisante pour les besoins des populations locales qui bénéficierait alors d’une agriculture diversifiée propice à une autosuffisance alimentaire qui peut devenir une impérieuse nécessité à cause de l’épuisement des énergies de stock. Avec un peu d’optimisme, on peut supposer qu’un réchauffement climatique rendrait clémente la vie dans ces régions avec des étés plus chauds et plus secs affaiblissant les influences océaniques néfastes sans ôter les influences fastes et notamment des précipitations suffisantes. Cependant il faut aussi souligner qu’une trop bonne adaptation aux conditions climatiques moyennes du milieu rend plus vulnérable aux conjonctions climatiques particulières aléatoires comme une sécheresse prolongée par exemple. Un dérèglement climatique avec des variations aléatoires de grandes amplitudes pourrait alors être particulièrement difficile à supporter ici comme ailleurs.
S’il est vrai qu’un changement climatique avec tendance au réchauffement est en œuvre, cet exemple de réactions aux contraintes que le climat impose en un lieu donné, l’absence de déterminisme qu’il met en lumière, tout cela montre qu’il est difficile d’en prévoir l’impact pour les populations humaines à l’échelon local d’autant qu’il est aussi difficile de prévoir comment se traduira à cet échelon le supposé réchauffement global.

Notes
(*) - Sans doute cela fut-il le cas aussi d’autres civilisations : celle de l’Ile de Pâque, ou des Incas qui ne purent supporter les contraintes rétroactives induites par les changements qu’elles avaient fait subir à leur milieu et qui disparurent, moururent comme aiment le dire certains ethnologues et philosophes. Il y a une différence cependant avec la civilisation occidentale. Celles-là étaient locales, celle-ci est en voie de mondialisation.
(**) - Ici encore la qualification ‘naturelle’, bien que conforme à l’usage ordinaire et administratif-juridique est assez impropre. Il n’y a calamité que parce qu’il y a culture, donc rien de naturel.

Lundi 10 Septembre 2012 Commentaires (1)
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