Au quotidien
La positon Obama/Hollande est une position « va-t’en guerre » qui n’est guère en harmonie avec le pacifisme, un des fondamentaux de l’écologie politique bien mal mené ces derniers temps par EELV. Indépendamment des principes, c’est aussi le soutien à une démarche aussi stupide que dangereuse mais celles et ceux qui veulent l’exprimer officiellement sont privés de parole à EELV. C'est ce qui est arrivé à Leila Aïchi, sénatrice EELV de Paris, membre de la commission des affaires étrangères de la défense et des forces armées. Son intervention était pourtant remarquable et aurait bien méritée d'être entendue au Palais du Luxembourg à la place de celle, insipide et suiviste d'André Gattolin.
Au Sénat lors du débat sans vote sur la Syrie, EELV disposait de 12 minutes pour son intervention. Le groupe étant divisé sur la question de la pertinence d’une intervention militaire, il avait été décidé qu’il y aurait une double intervention de six minutes chacune pour que s’expriment les deux points de vue. André Gattolin (membre de la commission de la culture – sénateur des Hauts-de- Seine) devait exposer le soutien à l’intervention armé telle que proposée par François Hollande. Leila Aïchi (membre de la commission des affaires étrangères de la défense et des forces armées – sénatrice de Paris) devait défendre une solution politique, sans intervention militaire, soumise à un vote. Le groupe a changé d’avis quelques heures avant le débat et a décidé de ne laisser s’exprimer que le soutien à l’exécutif, un soutien qui est pourtant regretté par une grande partie des militants d’EELV et des écologistes. Leila Aïchi a été évincée et interdite de parole.
Leila Aïchi a publié sur son blog l’intervention qu’elle n’a pas pu lire dans l’enceinte du Sénat. Ce texte mérite la plus large diffusion possible. Non tous les écologistes ne sont pas des va-t’en guerre inconscients. On y trouve une analyse très claire de la situation, des arguments très forts contre la malencontreuse « expédition punitive » illégale voulue par Hollande et Obama et les lignes de forces d’une solution alternative, politique. Elle éviterait de rajouter de la guerre à la guerre sans perspective et elle aurait les plus grandes chances de succès.
Voici des larges extraits de ce texte, ceux qui m’ont semblé les plus significatifs et auxquels j’adhère pleinement.
Leila Aïchi a publié sur son blog l’intervention qu’elle n’a pas pu lire dans l’enceinte du Sénat. Ce texte mérite la plus large diffusion possible. Non tous les écologistes ne sont pas des va-t’en guerre inconscients. On y trouve une analyse très claire de la situation, des arguments très forts contre la malencontreuse « expédition punitive » illégale voulue par Hollande et Obama et les lignes de forces d’une solution alternative, politique. Elle éviterait de rajouter de la guerre à la guerre sans perspective et elle aurait les plus grandes chances de succès.
Voici des larges extraits de ce texte, ceux qui m’ont semblé les plus significatifs et auxquels j’adhère pleinement.
La France doit sa place au Conseil de sécurité au droit international
Il nous faut inventer collectivement une nouvelle gouvernance mondiale et cette gouvernance, nécessairement multipolaire, ne peut s’affranchir de la règle de droit. Rappelons que c’est le droit, précisément la Chartre des Nations-Unies dans son article 23, et non le poids démographique ou la puissance économique, qui confère à notre pays la place éminente qu’il occupe au Conseil de sécurité, dont rien d’autre ne garantit qu’il la conserve dans le futur.
Une intervention militaire en Syrie serait déjà un échec en soi, pour une communauté internationale qui, à force de calculs stratégiques hasardeux et de protection d’intérêts divergents, s’est révélée incapable de peser politiquement pour contrer et faire plier le régime de Bechar el-Assad. La Syrie, quant à elle, s’est dramatiquement transformée avec la guerre civile.
Des affrontements radicalisés par une dimension confessionnelle
Les lignes de fracture recouvrent désormais la composition religieuse du pays : aux 60 % de sunnites, font face, dans une communauté de destin contrainte, les 12% d’alaouites, les 10% de chrétiens et les 6% de druzes. Sur le terrain, à l’armée régulière acquise au régime et inféodée au clan qui le dirige, font face des forces d’opposition, de moins en moins unifiées, rivales et parfois même antagonistes : l’armée syrienne libre (ALS), la coalition d’opposition, les islamistes,et les Kurdes syriens. En leur sein, le rapport de forces est chaque jour plus favorable aux extrémistes. La dimension confessionnelle du conflit a radicalisé les affrontements, figé les replis identitaires.
En deux ans, la guerre civile syrienne aura fait plus de 100.000 morts, 2 millions de réfugiés et 4 millions de déplacés.
Un dangereux entêtement
Il est légitime de se demander s’il est utile de rajouter de la guerre à la guerre. Alors quel est notre objectif politique ? Officiellement, il ne s’agit pas, ou plutôt il ne s’agit plus, d’aider au renversement du régime syrien mais de le «punir». Si l’on quitte la sphère politique pour celle du droit, alors il faut rester dans le droit et s’y conformer, ce qui est évidemment incompatible avec l’unilatéralisme. C’est ce qu’a rappelé, hier encore, Ban Kimoon. Nous n’y reviendrons pas.
Il nous est dit aussi qu’il s’agirait d’affaiblir Assad, qui est en train de prendre l’avantage, sans pour autant l’obliger à partir. Donc, si j’ai bien compris, permettre à la guerre civile de perdurer quelques années de plus. Mais, j’ai sans doute mal compris.
Existerait-il au moins des objectifs politiques : affaiblir la dictature baasiste, donner un peu d’espace et d’espérance à l’opposition démocratique ?
C’est soutenable sur le papier. J’observe toutefois que ni les démocrates syriens, ni les chrétiens d’Orient ne nous demandent d’intervenir. Pourquoi persister? Cet entêtement n’a aucun sens, si ce n’est de jeter les bases de la désintégration de la Syrie, avec pour corollaire un embrasement de la région.
Quelle serait l’efficacité purement militaire de cette intervention si le gouvernement persistait dans son projet ? Probablement détruire, par missiles de croisière - mais la France en a peu, des casernes vides. La vérité est que nous nous sommes imprudemment avancés sur ce dossier sans en avoir les moyens.
Une intervention limitée engagera une escalade des aides étrangères, et décuplera l’engrenage infernal de la guerre civile. Et comme le souligne Le général Desportes : «Il faut se garder d’aller trop loin. Si Bachar disparaît, il y aura un risque de massacres intercommunautaires».
Les éléments d’une solution politique au conflit
Punir le régime de Bachar el-Assad n’est qu’une réaction de court terme. La solution à ce conflit est avant tout politique. Dans cet esprit, nous devrions envisager une proposition basée sur les éléments suivants :
1. La convocation rapide, sous l’égide des Nations Unies , et à l’initiative des Etats-Unis, de la Russie et de l’Union Européenne, d’une nouvelle conférence pour la paix, dite de Genève II
2. La participation à cette conférence de toutes les parties concernées, à l’exclusion bien sûr des organisations terroristes, et de toutes les puissances régionales sans exclusive, en particulier de l’Iran qui cherche manifestement à rétablir le dialogue.
3. Le rétablissement progressif et contrôlé d’une paix civile, qui protège les intérêts de toutes les communautés syriennes, sans discrimination, et qui respecte les lignes de force de l'équilibre stratégique régional.
Le débat sur une éventuelle guerre en l'absence de l'approbation du Conseil de sécurité des Nations unies nous a éloigné du véritable enjeu : comment redynamiser la recherche d'un règlement politique de la crise syrienne.
Pour conclure, le risque d’une intervention dirigée par les Etats-Unis et la France est de laisser une Syrie divisée, instable, ayant permis l’accession à un nouveau pouvoir dominé par des éléments extrémistes.
Les intertitres sont de moi JFD.
Le texte complet de l'intervention de Leila Aïchi est consultable ici
Il nous faut inventer collectivement une nouvelle gouvernance mondiale et cette gouvernance, nécessairement multipolaire, ne peut s’affranchir de la règle de droit. Rappelons que c’est le droit, précisément la Chartre des Nations-Unies dans son article 23, et non le poids démographique ou la puissance économique, qui confère à notre pays la place éminente qu’il occupe au Conseil de sécurité, dont rien d’autre ne garantit qu’il la conserve dans le futur.
Une intervention militaire en Syrie serait déjà un échec en soi, pour une communauté internationale qui, à force de calculs stratégiques hasardeux et de protection d’intérêts divergents, s’est révélée incapable de peser politiquement pour contrer et faire plier le régime de Bechar el-Assad. La Syrie, quant à elle, s’est dramatiquement transformée avec la guerre civile.
Des affrontements radicalisés par une dimension confessionnelle
Les lignes de fracture recouvrent désormais la composition religieuse du pays : aux 60 % de sunnites, font face, dans une communauté de destin contrainte, les 12% d’alaouites, les 10% de chrétiens et les 6% de druzes. Sur le terrain, à l’armée régulière acquise au régime et inféodée au clan qui le dirige, font face des forces d’opposition, de moins en moins unifiées, rivales et parfois même antagonistes : l’armée syrienne libre (ALS), la coalition d’opposition, les islamistes,et les Kurdes syriens. En leur sein, le rapport de forces est chaque jour plus favorable aux extrémistes. La dimension confessionnelle du conflit a radicalisé les affrontements, figé les replis identitaires.
En deux ans, la guerre civile syrienne aura fait plus de 100.000 morts, 2 millions de réfugiés et 4 millions de déplacés.
Un dangereux entêtement
Il est légitime de se demander s’il est utile de rajouter de la guerre à la guerre. Alors quel est notre objectif politique ? Officiellement, il ne s’agit pas, ou plutôt il ne s’agit plus, d’aider au renversement du régime syrien mais de le «punir». Si l’on quitte la sphère politique pour celle du droit, alors il faut rester dans le droit et s’y conformer, ce qui est évidemment incompatible avec l’unilatéralisme. C’est ce qu’a rappelé, hier encore, Ban Kimoon. Nous n’y reviendrons pas.
Il nous est dit aussi qu’il s’agirait d’affaiblir Assad, qui est en train de prendre l’avantage, sans pour autant l’obliger à partir. Donc, si j’ai bien compris, permettre à la guerre civile de perdurer quelques années de plus. Mais, j’ai sans doute mal compris.
Existerait-il au moins des objectifs politiques : affaiblir la dictature baasiste, donner un peu d’espace et d’espérance à l’opposition démocratique ?
C’est soutenable sur le papier. J’observe toutefois que ni les démocrates syriens, ni les chrétiens d’Orient ne nous demandent d’intervenir. Pourquoi persister? Cet entêtement n’a aucun sens, si ce n’est de jeter les bases de la désintégration de la Syrie, avec pour corollaire un embrasement de la région.
Quelle serait l’efficacité purement militaire de cette intervention si le gouvernement persistait dans son projet ? Probablement détruire, par missiles de croisière - mais la France en a peu, des casernes vides. La vérité est que nous nous sommes imprudemment avancés sur ce dossier sans en avoir les moyens.
Une intervention limitée engagera une escalade des aides étrangères, et décuplera l’engrenage infernal de la guerre civile. Et comme le souligne Le général Desportes : «Il faut se garder d’aller trop loin. Si Bachar disparaît, il y aura un risque de massacres intercommunautaires».
Les éléments d’une solution politique au conflit
Punir le régime de Bachar el-Assad n’est qu’une réaction de court terme. La solution à ce conflit est avant tout politique. Dans cet esprit, nous devrions envisager une proposition basée sur les éléments suivants :
1. La convocation rapide, sous l’égide des Nations Unies , et à l’initiative des Etats-Unis, de la Russie et de l’Union Européenne, d’une nouvelle conférence pour la paix, dite de Genève II
2. La participation à cette conférence de toutes les parties concernées, à l’exclusion bien sûr des organisations terroristes, et de toutes les puissances régionales sans exclusive, en particulier de l’Iran qui cherche manifestement à rétablir le dialogue.
3. Le rétablissement progressif et contrôlé d’une paix civile, qui protège les intérêts de toutes les communautés syriennes, sans discrimination, et qui respecte les lignes de force de l'équilibre stratégique régional.
Le débat sur une éventuelle guerre en l'absence de l'approbation du Conseil de sécurité des Nations unies nous a éloigné du véritable enjeu : comment redynamiser la recherche d'un règlement politique de la crise syrienne.
Pour conclure, le risque d’une intervention dirigée par les Etats-Unis et la France est de laisser une Syrie divisée, instable, ayant permis l’accession à un nouveau pouvoir dominé par des éléments extrémistes.
Les intertitres sont de moi JFD.
Le texte complet de l'intervention de Leila Aïchi est consultable ici
Vendredi 6 Septembre 2013
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