Un ancien directeur de l’AIEA a déclaré au journal « Le monde » du 29 septembre 2011 « la transparence est la clé pour faire accepter le nucléaire à l’opinion ». Si c’était vrai, alors ladite opinion n’est pas prête à l’accepter car une totale transparence montrerait son extrême dangerosité. De même que le nucléaire est incompatible avec la démocratie, il l’est avec la transparence.
Quand le CEA de Fontenay-aux-Roses fait la sourde oreille
On peut l’expérimenter avec le CEA et son attitude envers la CLI de FAR et l’impossibilité d’avoir des réponses précises à des questions pourtant simples telles que celle sur le coût total des opérations réalisées depuis le début du démantèlement jusqu’à aujourd’hui, ou bien celle de savoir ce qu’il a répondu à la demande faite par l’ASN dans sa lettre du 13 octobre 2009, ( p.2) concernant les effluents de la cuve n°5 du bâtiment 18 de l’INB n°165 et quel a été le traitement retenu pour ces effluents*, etc. Et pourtant, il n’y a pour l’heure ni accident, ni situation de crise.
Un accident industriel ou un accident nucléaire ?
Lorsque cela est le cas, comme dans l’accident survenu au Centraco de Marcoule, même les faits ont bien du mal à être établis. On a parlé de l’explosion d’un four où étaient brulés des déchets dont on ignore toujours la provenance et dont on a ignoré longtemps le degré de radioactivité, explosion qui a fait un mort et quatre blessés dont un grave. Mais est-ce qu’il y a eu explosion ? Ce n’est même pas certain.
On peut l’expérimenter avec le CEA et son attitude envers la CLI de FAR et l’impossibilité d’avoir des réponses précises à des questions pourtant simples telles que celle sur le coût total des opérations réalisées depuis le début du démantèlement jusqu’à aujourd’hui, ou bien celle de savoir ce qu’il a répondu à la demande faite par l’ASN dans sa lettre du 13 octobre 2009, ( p.2) concernant les effluents de la cuve n°5 du bâtiment 18 de l’INB n°165 et quel a été le traitement retenu pour ces effluents*, etc. Et pourtant, il n’y a pour l’heure ni accident, ni situation de crise.
Un accident industriel ou un accident nucléaire ?
Lorsque cela est le cas, comme dans l’accident survenu au Centraco de Marcoule, même les faits ont bien du mal à être établis. On a parlé de l’explosion d’un four où étaient brulés des déchets dont on ignore toujours la provenance et dont on a ignoré longtemps le degré de radioactivité, explosion qui a fait un mort et quatre blessés dont un grave. Mais est-ce qu’il y a eu explosion ? Ce n’est même pas certain.
Les autorités diverses, exploitant, ministres se sont hâtés de rassurer. Un porte-parole d’EDF dont une filiale, la Socodei, exploite les installations de Centraco s’est empressé de claironner qu’il s’agissait d’un accident industriel, pas d’un accident nucléaire, ce qu’ont répété aussitôt sans beaucoup de discernement les média français. La présidente d’Areva avait déjà entonné le même couplet à propos de Fukushima. Le mort étant de nationalité espagnole, les journalistes de ce pays se sont montrés plus curieux que les journalistes français. Rue 89 rapporte que « selon le quotidien espagnol Publico, les autorités françaises cherchent à cacher l'origine radioactive de l'accident qui a eu lieu lundi 12 septembre sur le site de Marcoule, faisant un mort et quatre blessés. Selon leurs informations, la victime a été contaminée : le cercueil, mis en terre samedi, est protégé par un blindage spécial et la famille n'a pas pu voir le cadavre. Le quotidien croit également savoir qu'aucune autopsie n'a été effectuée. Et seuls les gendarmes, équipés de combinaisons de protection, ont eu accès au hangar où a eu lieu l'explosion. » On sait aujourd’hui que la radioactivité des déchets métalliques présents dans le four au moment de l'explosion était 476 fois supérieure au chiffre publié par l'IRSN sur la base des déclarations de l’exploitant. La CRIIRAD avait dénoncé dès le 23 septembre, dans un courrier officiel aux autorités, l'incohérence des résultats officiels et demandé au Procureur de la République la réalisation de mesures de débits de dose et d'analyses en laboratoire afin d'établir l'activité réelle des déchets. Aujourd’hui elle porte plainte.
Dans cd courrier du 23 septembre, elle dénonçait le maintien du secret sur les éléments clefs du dossier et la publication, par l’IRSN, d’un chiffre étonnamment faible (63 000 Bq) pour l’activité des 4 tonnes de déchets métalliques présents dans le four au moment de l’explosion. La CRIIRAD jugeait cette évaluation« absolument incompatible » avec le débit de dose de 8,5 μSv/h qui aurait été relevé sur le corps de la victime de l’explosion. Une fois qu’elle a eu confirmation de ce débit de dose, la CRIIRAD a adressé le 29 Septembre au Procureur de la République, un courrier officiel soulignant qu’il est «impossible de mesurer un débit de dose aussi élevé si la contamination provient de déchets métalliques aussi faiblement contaminés que l’affirment l’exploitant et l’IRSN.» Dans ce courrier, elle demandait également que l’instruction intègre la réalisation d’une cartographie dosimétrique et des analyses pour établir l’activité réelle des 4 tonnes de déchets radioactifs. La CRIIRAD avait raison puisque l’ASN indiquait le 29 septembre sur son site que « le four de fusion contenait, au moment de l’accident, une charge d’environ 4 tonnes de déchets pour une activité de 30 MBq et non de 63 KBq comme l’a initialement indiqué l’exploitant », soit une sous-estimation de la radioactivité d’environ 500 fois, une erreur pour le moins grossière, qu’il faudra bien expliquer.
Pour la CRIIRAD cette rectification pose de « très lourdes questions » à savoir : « 1. Cette réévaluation aurait-elle été publiée si la CRIIRAD n’avait pas interpellé officiellement, par lettre recommandée avec accusé de réception, les différentes autorités le 23 septembre dernier ?
2. Comment se fait-il que l’expert de l’Etat, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, qui était présent sur le site et qui dispose de moyens sans commune mesure avec ceux de la CRIIRAD, ait repris sans réserve l’évaluation suspecte de l’exploitant ? Le chiffre de 63 KBq a été publié dès le 12 septembre par l’IRSN et sans aucun correctif ultérieur.
3. Quel crédit apporter à l’auto-surveillance de l’exploitant, dispositif essentiel du contrôle de l’installation CENTRACO? (…) Il est tout à fait improbable qu’il s’agisse d’un malheureux concours de circonstances, que l’explosion concerne le seul lot de déchets mal évalué par l’exploitant(…) On est d’ailleurs en droit de se demander si la CENTRACO ne fonctionne pas en complète violation des prescriptions qui régissent son fonctionnement : violation des dispositions du décret d’autorisation qui limitent l’activité totale qu’elle est autorisée à détenir ; violation des limites de rejets de polluants radioactifs et chimiques dans l’atmosphère et dans le Rhône. Si les rejets réels sont 10 fois ou 100 fois supérieurs aux rejets déclarés, le dépassement des limites de rejets de tritium ou d’émetteurs alpha serait par exemple avéré. »
Des nucléocrates fidèles à eux-mêmes
On peut conclure avec la CRIIRAD que « dans le domaine du nucléaire, les dossiers changent mais les constats restent les mêmes : sous-évaluation des risques du côté de l’exploitant et manque d’esprit critique, voire complaisance, du côté des experts officiels » et aussi de certains médias. Mensonges par omission, voire mensonges tout court, dissimulation, opacité… Le nucléaire qu’il soit civil ou militaire craint la lumière.
_______________________________________
*Voici le texte de la lettre de l’ASN : « Les inspecteurs se sont intéressés aux modalités de rejets des effluents contenus dans la cuve n°5 du bâtiment n°18 (INB n°165 – Procédé). En effet, cette cuve comporte environ 20 m3 d’effluents chargés en nitrates, sulfates et surtout en métaux (chrome, fer, nickel, aluminium, argent, zinc, traces de cadmium…). Certaines de ces substances sont considérées comme dangereuses et prioritaires au sens des directives européennes en vigueur du fait de leur impact sur le milieu. Ces effluents ne sont a priori pas marqués du point de vue radiologique. Vous envisagez de les rejeter lors de la vidange du bassin de stockage des eaux d’extinction d’incendie afin de respecter les valeurs limites réglementaires qui vous sont imposées en sortie du centre. J’estime que cette dilution programmée d’effluents non marqués radiologiquement n’est pas une solution satisfaisante. » (p.2 de la lettre de suivi du 13/10/2009 ) L’ASN a donc demandé au CEA de Fontenay-aux-Roses « d’investiguer d’autres possibilités de traitement des effluents contenus dans la cuve n°5 du bâtiment n°18. Vous me ferez part des résultats de vos recherches et de la solution retenue avec les justifications associées préalablement à sa mise en œuvre. »
Liste des acronymes :
ASN : Autorité de sûreté nucléaire.
AIEA : Agence internationale pour l’énergie nucléaire.
CEA : Centre d’Étude Atomique.
CLI : Commission locale d’information.
CENTRACO : Centre de traitement et de conditionnement des déchets radioactifs.
CRIIRAD : Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité.
FAR : Fontenay-aux-Roses.
IRSN : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.
SOCODEI : Société pour le conditionnement des déchets et des effluents industriels.
Dans cd courrier du 23 septembre, elle dénonçait le maintien du secret sur les éléments clefs du dossier et la publication, par l’IRSN, d’un chiffre étonnamment faible (63 000 Bq) pour l’activité des 4 tonnes de déchets métalliques présents dans le four au moment de l’explosion. La CRIIRAD jugeait cette évaluation« absolument incompatible » avec le débit de dose de 8,5 μSv/h qui aurait été relevé sur le corps de la victime de l’explosion. Une fois qu’elle a eu confirmation de ce débit de dose, la CRIIRAD a adressé le 29 Septembre au Procureur de la République, un courrier officiel soulignant qu’il est «impossible de mesurer un débit de dose aussi élevé si la contamination provient de déchets métalliques aussi faiblement contaminés que l’affirment l’exploitant et l’IRSN.» Dans ce courrier, elle demandait également que l’instruction intègre la réalisation d’une cartographie dosimétrique et des analyses pour établir l’activité réelle des 4 tonnes de déchets radioactifs. La CRIIRAD avait raison puisque l’ASN indiquait le 29 septembre sur son site que « le four de fusion contenait, au moment de l’accident, une charge d’environ 4 tonnes de déchets pour une activité de 30 MBq et non de 63 KBq comme l’a initialement indiqué l’exploitant », soit une sous-estimation de la radioactivité d’environ 500 fois, une erreur pour le moins grossière, qu’il faudra bien expliquer.
Pour la CRIIRAD cette rectification pose de « très lourdes questions » à savoir : « 1. Cette réévaluation aurait-elle été publiée si la CRIIRAD n’avait pas interpellé officiellement, par lettre recommandée avec accusé de réception, les différentes autorités le 23 septembre dernier ?
2. Comment se fait-il que l’expert de l’Etat, l’Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, qui était présent sur le site et qui dispose de moyens sans commune mesure avec ceux de la CRIIRAD, ait repris sans réserve l’évaluation suspecte de l’exploitant ? Le chiffre de 63 KBq a été publié dès le 12 septembre par l’IRSN et sans aucun correctif ultérieur.
3. Quel crédit apporter à l’auto-surveillance de l’exploitant, dispositif essentiel du contrôle de l’installation CENTRACO? (…) Il est tout à fait improbable qu’il s’agisse d’un malheureux concours de circonstances, que l’explosion concerne le seul lot de déchets mal évalué par l’exploitant(…) On est d’ailleurs en droit de se demander si la CENTRACO ne fonctionne pas en complète violation des prescriptions qui régissent son fonctionnement : violation des dispositions du décret d’autorisation qui limitent l’activité totale qu’elle est autorisée à détenir ; violation des limites de rejets de polluants radioactifs et chimiques dans l’atmosphère et dans le Rhône. Si les rejets réels sont 10 fois ou 100 fois supérieurs aux rejets déclarés, le dépassement des limites de rejets de tritium ou d’émetteurs alpha serait par exemple avéré. »
Des nucléocrates fidèles à eux-mêmes
On peut conclure avec la CRIIRAD que « dans le domaine du nucléaire, les dossiers changent mais les constats restent les mêmes : sous-évaluation des risques du côté de l’exploitant et manque d’esprit critique, voire complaisance, du côté des experts officiels » et aussi de certains médias. Mensonges par omission, voire mensonges tout court, dissimulation, opacité… Le nucléaire qu’il soit civil ou militaire craint la lumière.
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*Voici le texte de la lettre de l’ASN : « Les inspecteurs se sont intéressés aux modalités de rejets des effluents contenus dans la cuve n°5 du bâtiment n°18 (INB n°165 – Procédé). En effet, cette cuve comporte environ 20 m3 d’effluents chargés en nitrates, sulfates et surtout en métaux (chrome, fer, nickel, aluminium, argent, zinc, traces de cadmium…). Certaines de ces substances sont considérées comme dangereuses et prioritaires au sens des directives européennes en vigueur du fait de leur impact sur le milieu. Ces effluents ne sont a priori pas marqués du point de vue radiologique. Vous envisagez de les rejeter lors de la vidange du bassin de stockage des eaux d’extinction d’incendie afin de respecter les valeurs limites réglementaires qui vous sont imposées en sortie du centre. J’estime que cette dilution programmée d’effluents non marqués radiologiquement n’est pas une solution satisfaisante. » (p.2 de la lettre de suivi du 13/10/2009 ) L’ASN a donc demandé au CEA de Fontenay-aux-Roses « d’investiguer d’autres possibilités de traitement des effluents contenus dans la cuve n°5 du bâtiment n°18. Vous me ferez part des résultats de vos recherches et de la solution retenue avec les justifications associées préalablement à sa mise en œuvre. »
Liste des acronymes :
ASN : Autorité de sûreté nucléaire.
AIEA : Agence internationale pour l’énergie nucléaire.
CEA : Centre d’Étude Atomique.
CLI : Commission locale d’information.
CENTRACO : Centre de traitement et de conditionnement des déchets radioactifs.
CRIIRAD : Commission de recherche et d’information indépendante sur la radioactivité.
FAR : Fontenay-aux-Roses.
IRSN : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire.
SOCODEI : Société pour le conditionnement des déchets et des effluents industriels.
Mardi 4 Octobre 2011
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